Zoom sur les revendications du patronat gabonais à Ali Bongo pour l’année 2016

Une Economie
vendredi, 26 février 2016 02:57
Zoom sur les revendications du patronat gabonais à Ali Bongo pour l’année 2016

(Le Nouveau Gabon) - Les entreprises gabonaises ont récemment exposé au président gabonais, Ali Bongo, leurs exigences pour mieux impulser la croissance au Gabon en 2016. C’était le 05 janvier 2016 lors de la traditionnelle cérémonie de présentation des vœux au président de la République. Et pour porter la voix des chefs d’entreprises du Gabon, Jean-Bernard Boumah, le directeur général exécutif du groupe Ceca-Gadis (magasins de distribution CKDO/GABOPRIX, SuperCKDO, Géant CKDO et MaxiCKDO), qui a été confirmé le 11 février 2016 à la tête de la Confédération patronale gabonaise (CPG) en remplacement de Madeleine Berre, promue au poste de ministre du Commerce, des Petites et moyennes entreprises, de l'Artisanat, du Tourisme et du Développement des services dans le gouvernement du 11 septembre 2015.

En présentant les vœux du patronat gabonais à Ali Bongo, Jean-Bernard Boumah a donc profité pour présenter les attentes et exigences des chefs d’entreprises à Ali Bongo et au gouvernement gabonais. En 2016, pour que les entreprises s’approprient les trois questions fondamentales exigées par le président à savoir la croissance, la compétitivité et l’emploi, il y a des préalables que le gouvernement devrait respecter. Surtout que 2015 a été une année particulièrement difficile pour les entreprises gabonaises, d’après lui. Ceci du fait de la chute du cours du baril du pétrole à l’international. Encore que cette année 2016, relève-t-il, les prévisions, comme ailleurs dans le monde, font naître quelques préoccupations. D’où l’interpellation d’Ali Bongo : « Excellence Monsieur le président de la République, face à cette crise, jamais notre pays aura autant besoin de ses entrepreneurs, car ce sont eux qui pourront faire gagner le Gabon en l’aidant à s’adapter et à se réformer. Surtout que ces réformes que vous portez depuis votre accession à la magistrature suprême ont pour objectif final la croissance, la compétitivité et l’emploi. »

 

Solder la dette intérieure et le rembourser la TVA

Les entreprises gabonaises se sont approprié ces trois questions et ont un devoir de réussite, indique Jean-Bernard Boumah. « Mais, il nous faudra pour cela agir vite et ensemble », propose-t-il. « Agir vite et ensemble pour un règlement rapide de la dette intérieure d’une part et le remboursement des crédits de TVA d’autre part qui sont nos préoccupations majeures. Le remboursement à hauteur de 40% ou plus d’encours de la dette par exemple et le recours à la formule du Club de Libreville, qui bien que faisant appel à la patience, a fait ses preuves. » Le mot est donc lâché : dette. Et c’est le point principal de divergences entre le secteur privé gabonais et les pouvoirs publics, accusés de non-paiement de cette dette publique intérieure de l’Etat estimée à 29 milliards de Francs Cfa par le ministère du Budget en 2015.

Il faut donc, martèle le patron de la CPG au président gabonais, « agir vite et ensemble pour épargner nos entreprises des coûts et frais qui alourdissent leurs charges, et par voie de conséquence parviennent de manière détournée ou automatique à porter un coup au panier de la ménagère et à la compétitivité de nos entreprises. Agir vite et ensemble afin de rassembler toutes les entreprises du Gabon et les impliquer fortement dans le développement du tissu économique de notre pays. Mais aussi, inciter la puissance publique à garantir par tous les moyens à l’égalité des traitements entre tous les acteurs économiques quelque soient leurs dimensions. »

Ces mots ont sans doute résonné. Car, récemment, le 17 février dernier, le Premier ministre, Daniel Ona Ondo, a rencontré les opérateurs marocains installés au Gabon pour les rassurer de ce que cette dette publique intérieure sera bel et bien apurée. Daniel Ona Ondo a indiqué que son gouvernement est conscient que les retards dans le respect de ses engagements financiers pourraient freiner le développement de leurs activités et mettre en péril des emplois. Il leur a promis que les efforts d’apurement de la dette intérieure entamés par le gouvernement depuis 2014 vont se poursuivre.

Pour montrer la gravité de la situation, Ait Ben Ali Mohamed, le DG de Satram a exposé au PM l’expérience de son entreprise. Pour lui, la crise est sévère à Port-Gentil, car il travaille avec des compagnies pétrolières qui subissent, de plein fouet, les effets de chute des cours du pétrole à l’international. Ce qui a une répercussion sur son chiffre d’affaires qui a baissé de 45%. Plus encore, 700 de ses 2 800 employés devraient être licenciés, faute d’activité. Mais, Satram supporte encore les coûts malgré les recettes qui baissent.

Christian Magnagna, le ministre du Budget qui accompagnait le Premier ministre à cette rencontre a aussi tenu à rassurer ces opérateurs économiques. Pour lui, en 2015, l’Etat a réglé sa dette à hauteur de 124 milliards de francs et pour l’année 2016, 157 milliards de francs seront payés. Chiffres du ministre rapportés par Gabon Review.

 

Un Comité pour les procédures de règlement de la dette

Pour montrer sa volonté à solder cette question de dette intérieure, le gouvernement gabonais avait mis en place en novembre 2015 un Comité interministériel d’audit et de certification de la dette intérieure de l’Etat, en abrégé le CIADCIE.  Sa mission, restaurer la crédibilité de l’Etat vis-à-vis de ses partenaires et permettre aux entreprises de retrouver leur santé financière et lutter contre le chômage. Son président, Fabrice Andjoua Bongo Ondimba, avait multiplié des rencontres avec les entreprises et les PME gabonaises pour discuter avec elles des modalités de paiement de cette dette.

En décembre 2015 par exemple, au cours d’une rencontre avec les PME, le CIADCIE avait présenté le chronogramme des paiements et expliqué que pour que l’Etat ne paye plus les entreprises fictives, les paiements de cette dette seront effectués après vérification des travaux réalisés par les entreprises adjudicataires. Pour ces vérifications, le CIADCIE avait indiqué que six mois seraient nécessaires pour recenser toutes les entreprises et PME avant d’entamer les paiements.

Dans le détail, la première étape du travail du CIADCIE consistera à la création d’un guichet unique pour le recensement des entreprises et PME. La deuxième étape consistera à la vérification du travail accompli par ces sociétés avant la dernière étape qui consistera à établir le listing définitif des entreprises concernées. Ceci avant les paiements.

Au cours de cette rencontre, les PME ont dit au CIADCIE leur volonté d’être traitées au même titre que les grandes entreprises du pays, plus favorisées dans le paiement de cette dette. Un mois plus tôt, le ministre du Budget et des Comptes publics, Christian Magnagna, avait indiqué que l’Etat gabonais avait déjà dégagé un montant de près de 10 milliards de FCFA au profit de 480 PME et PMI et que la vérification du travail effectué sera faite avant tout paiement.

Le montant global de la dette intérieure du pays s’élève aujourd’hui à 400 milliards de francs Cfa, selon la Direction générale de la Dette (DGD). Pour l’année 2015, et à fin décembre 2015, la dette intérieure du Gabon était projetée à 150,885 milliards F.CFA. Jusqu’au 30 septembre 2015, le service de la dette publique directe s’élevait à 356,663 milliards de FCFA et comprenait 255,752 milliards de FCFA de dette extérieure et 100,911 milliards de FCFA de dette intérieure. La DGD indiquait alors que le service de la dette intérieure comprenait 82,295 milliards de FCFA de capital et 18,616 milliards de FCFA d’intérêts. Les règlements intérieurs se sont élevés à la même période à 63,123 milliards de FCFA de remboursements et 11,337 milliards de FCFA d’intérêts

 

Dette intérieure du Gabon au 30 septembre 2015

 

Type de dette

Montant

Règlements

Dettes bancaires 

44,910 milliards de F.CFA

44,910 milliards de F.CFA

Dettes diverses 

21,247 milliards de F.CFA

21,413 milliards de F.CFA*

Dettes moratoires

32,226 milliards de F.CFA 

32,512 milliards de F.CFA*

Dettes envers le marché financier régional

2,528 milliards de F.CFA

2,528 milliards de F.CFA*

Source : données compilées avec les chiffres de la DGD. dette.ga

*Il faut noter que la DGD précise que le montant total des règlements intègre le paiement des échéances antérieures à 2015 pour 1,848 milliard de FCFA et des paiements par anticipation des titres des Eurobonds émis en 2007 et 2013 pour un montant global de 23,256 milliards de FCFA.

 

Miser sur l’entreprise

En plus du règlement de la dette intérieure, le patronat gabonais a présenté au président de la République le 05 janvier dernier, d’autres pistes pour que pour que les entreprises gabonaises participent pleinement à la croissance du pays. Parmi ces pistes, le développement du partenariat public-privé. Car cela permettra d’avoir au Gabon « un dispositif approprié et bénéfique pour les deux parties prenantes », pense le patron de la CPG.

Certains textes réglementaires en matière de formation sont attendus par les entreprises. Il s’agit, relève Jean-Bernard Boumah, « des textes importants sur l’apprentissage et la formation professionnelle vivement attendus pour organiser et réguler efficacement ces domaines. Tous ces dispositifs sont essentiels pour assurer l’employabilité des jeunes et lutter efficacement contre le chômage de cette tranche de la population ».

 

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Aussi, Jean-Bernard Boumah (photo), a invité Ali Bongo à un forum avec le secteur privé afin de mieux s’imprégner de leurs problèmes et tracer les chemins de la croissance : « Monsieur le président de la République, vous avez fait le pari de l’entreprise. Vous faites confiance aux entreprises et aux entrepreneurs. Vous ne manquez pas de manifester votre soutien et vos encouragements. Vous avez raison. Aussi, voudrais-je profiter de cette circonstance solennelle pour vous transmettre l’invitation de ces entrepreneurs à une nouvelle rencontre afin d’échanger sur les enjeux de développement de notre pays ». Ceci afin que les entreprises soient plus confiantes de l’attention du pouvoir en place.

Pour Jean-Bernard Boumah, quel que soit leur secteur d’activité, quelle que soit leur localité et quelle que soit leur taille, toutes les entreprises du Gabon ont un rôle à jouer pour la croissance du pays. « Cellule humaine la plus importante après la famille, l’entreprise est un lieu de développement personnel, d’intégration sociale, de dignité humaine par le travail individuel et collectif. Mais, l’entreprise est aussi, je le crois profondément ce qui permettra de résoudre la très grande majorité des défis auxquels notre pays est confronté. L’entreprise porte en effet en elle l’esprit d’initiative, de créativité, d’adaptation permanente, de travail d’équipe et la volonté de bâtir un monde meilleur. Encore faut-il, Monsieur le président de la République l’accompagner dans sa croissance, tant sur le plan économique et social que du point de vue de la sécurité juridique », a rappelé le président de la CPG.

En réponse à toutes ces doléances, Ali Bongo a invité le gouvernement à travailler de commun accord avec tous les acteurs économiques et sociaux pour que « l’économie de rente laisse la place à l’économie de production, à la justice et au mérite, seule manière de développer durablement le Gabon au profit du plus grand nombre ».  Les entreprises et PME attendent donc, en espérant avoir été entendues.

Beaugas-Orain Djoyum

 
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