(Le Nouveau Gabon) - Le ministre des PME, depuis son arrivée dans ce département ministériel, veut apporter des innovations et des réponses à diverses situations auxquelles sont confrontées les entreprises de manière générale et les PME en particulier. Pour cette interview, Biendi Maganga Moussavou (photo) aborde diverses préoccupations relatives au financement, à l’apport des PME dans l’économie, aux réformes engagées par son département ministériel, etc.
Qu’est-ce que vous faites pour que le ministère des PME soit visible au niveau des populations ?
Pour la première fois, dans notre pays, on a introduit une terminologie qui n’existait pas. C’est l’entrepreneuriat national. Le ministère que j’occupe est celui de la promotion des petites et moyennes entreprises chargé de l’entrepreneuriat national. Qu’est-ce que l’entrepreneuriat national ? Il commence avec les Gabonais économiquement faibles, que nous essayons de transformer dans le cadre de la vie associative, des coopératives, des mutuelles en agents économiques, en leur donnant une formation pour que grâce à des financements, ils soient orientés vers les activités génératrices de revenus. Ce segment est géré par la direction de l’économie sociale. Vous avez également l’artisanat qui dans un pays comme la France, est considéré comme la première entreprise; or, chez nous, ce secteur est mal connu, mal cerné et pourtant, il est là pour incarner la maîtrise des métiers, la tradition.
Vous avez aussi la partie PME que tout le monde connaît. Nous avons pris le soin d’en introduire une nouvelle définition dans la loi, dont nous souhaitons voir l’adoption intervenir le plus rapidement possible. Maximum 3 milliards de Fcfa de chiffre d’affaires. Maximum 200 emplois. Une société de droit gabonais qui n’est pas filiale ou succursale d’un groupe international.
Mais, en réalité, dans la vraie vie, une PME c’est quoi ? C’est une entreprise à la base. C’est quelqu’un qui croit en son projet, qui crée un emploi, qui crée de la richesse. C’est tout un écosystème qui se met en place pour créer de la richesse.
L’environnement des affaires pose problème. En êtes-vous conscients ?
Cela ne nous a pas échappé. Nous en avons conscience. Cet environnement fait partie des préoccupations du gouvernement. L’organisation du Haut conseil pour l’investissement pose les bases d’un dialogue public-privé pour améliorer l’environnement des affaires et le rendre beaucoup plus compétitif. Il y a un certain nombre d’aspects qui nécessitent d’être améliorés. Et c’est ce à quoi nous nous attellerons dans le cadre de ce programme.
La réalité montre autre chose. Comment faire pour que le Gabonais lambda sache que le ministère des PME est à son service ?
Déjà, à la base, il y a une initiative. Elle est très importante parce que c’est le point de départ de l’histoire. Le rôle du gouvernement est de faciliter la création des entreprises, la formation de ceux qui veulent entreprendre, permettre un meilleur accès aux financements et aux marchés. Voici ce à quoi nous nous attacherons.
Vous avez parlé de la facilitation par l’Etat. Il y a eu, par le passé, la création du Fada, du Fodex… Tout cela est au cimetière aujourd’hui. Qu’est-ce que vous proposez de nouveau ?
Je regrette que toutes ces institutions soient au cimetière. Les leçons ont été tirées. Toutes les institutions que nous souhaitons lancer se feront avec une meilleure gouvernance. La gouvernance est très importante. Quand vous prenez le fonds de garantie des PME, dont nous avons indiqué qu’il faisait partie des priorités de notre ministère, nous avons choisi pour nous accompagner des partenaires de premier plan, qui ont réellement une expertise. Je prends l’exemple de BPI France, qui est leader en France, en matière de garantie de PME, et African Guarantee Fund, filiale de l’Afd.
Fallait-il une expertise extérieure ?
Non. Nous sommes dans un secteur nouveau. Nous devons mélanger nos expériences avec une expertise extérieure pour une meilleure appropriation de la donne.
Les banques ont du mal à prêter aux jeunes qui veulent se lancer dans l’entrepreneuriat…
Il ne s’agit pas de dire que les banques ne prêtent pas. Elles prêtent à qui ? Elles doivent proposer à des gens qui ont une idée, à des entrepreneurs que nous avons accompagnés. C’est ce à quoi servent les incubateurs que nous souhaitons créer. Vous avez des incubateurs, des espaces de rencontres, des espaces PME, qui comptent aujourd’hui près de 1 600 entreprises qui reçoivent leur bulletin d’entreprise et 86 entreprises intégrées dans un échange d’expériences.
Après ces Gabonais formés, nous espérons avoir un financement adapté. Le fonds de garantie a pour objet de favoriser la flexibilité bancaire et du secteur des établissements de microfinance pour faire en sorte que non seulement le taux à la sortie soit moins important, mais également qu’il y ait des intérêts pour les banques à financer les PME. C’est 50% de garantie. Je peux vous assurer que ce n’est pas rien. Le fonds de garantie ne se substitue pas aux banques.
La réforme du statut particulier des artisans a été lancée. Peut-on avoir une idée des avancées ?
Au Gabon, notre ministère a dénombré près de 200 métiers dans le pays. L’artisanat d’art, de production et de service. Il faut continuer à faire le recensement. Cette réforme consiste d’abord à leur donner une représentation dans le cadre de la réunion que nous avons organisée en Afrique centrale, en créant à Libreville, la Confédération des artisans de petites entreprises d’Afrique centrale. C’est ce que nous avons fait en créant la Confédération gabonaise qui va abriter les fédérations et les associations d’artisans. Grâce à ce regroupement, si la nouvelle loi sur l’artisanat est adoptée, nous allons procéder, en collaboration avec les représentants des artisans, les ministères des PME, de l’Education nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement technique, à la création d’une Chambre nationale des métiers. Celle-ci va contribuer à avoir un processus normé d’apprentissage dans notre pays pour qu’à la fin, on ait une carte d’artisans.
On constate, malheureusement, qu’il y a des entreprises qui ferment parce que l’Etat n’a pas payé, elles ne peuvent plus rentrer dans leurs fonds…
Ce qui est important, c’est de savoir qu’une fois qu’on a posé les bases concernant l’artisanat, il y aura un statut de l’entreprise artisanale. Tout comme il y aura un statut d’entrepreneur pour les PME. C’est un statut qui va permettre de formaliser le secteur informel et de faciliter la création d’entreprises pour les entreprises nouvelles.
Pour ce qui est des entreprises qui ferment, on y a beaucoup réfléchi au sein du gouvernement. On sait qu’il y a des raisons qui entraînent cette situation, parmi lesquelles on constate que souvent, les entreprises saisissent les opportunités un peu rapidement, sans forcément respecter les règles. Il y en a qui n’existent pas vraiment, qui sont le produit d'un one man show.
Ce que nous souhaitons, c’est que les entreprises respectent les procédures et qu’elles soient structurées et, d’autre part, que nous respections de manière ferme le respect de la passation de la commande publique, de la passation de marchés. Il est important de respecter au minimum 70% de marché par compétence.
SeM (avec la presse locale)