Le président nouvellement réélu de l’organisation patronale gabonaise (OPG), qui regroupe en son sein uniquement les PME locales, apporte une contribution au débat sur la vie chère, les mesures et recommandations prises lors du conseil de l’investissement ainsi qu’à la relance de l’économie.
Il profite également pour évoquer l’entrepreneuriat jeune et les politiques à mettre en place pour intéresser davantage de jeunes à s’éloigner du secteur public, notamment du travail à la fonction publique, au profit de la création de richesse.
Les populations ploient sous le poids de la hausse des denrées alimentaires. Qu’est-ce qui de votre point de vue peut justifier cette augmentation des prix en cette période sensible et délicate?
Le patronat n’a jamais été d’accord avec la mise en place de la taxe sur la contribution spéciale pour la solidarité (CSS) ; certains vous diront qu’ils sont d’accord, mais la finalité de cette taxe c’est de contribuer à la cherté de la vie. Nous sommes en période délicate et certains membres du patronat n’ont pas donné leur quitus par rapport à cette CSS sur laquelle s’arc-boutent les opérateurs économiques pour justifier la hausse des prix des denrées alimentaires que l’on vit actuellement.
Le gouvernement a engagé un programme visant la relance de l’économie. Comment appréciez-vous ce plan ?
Nous traversons une période difficile et c’est pour cette raison que la relance, à mon humble avis, sera difficile. Il faut passer par des procédures convaincantes. Et le Haut conseil de l’investissement (HCI) est l’une des voies à travers lesquelles nous pourrons relancer notre économie. En dehors de cela, il nous sera difficile d’inventer une solution miracle. Il suffit de suivre les recommandations du HCI, pour que notre économie se relance efficacement.
Quelle appréciation faites-vous des mesures prises lors de la tenue de cette instance justement?
La mise en place du Conseil de l’investissement est ce que les opérateurs économiques attendaient par rapport à la situation économique que nous traversons. Il fallait bien que cela ait lieu pour envisager les mesures qui allaient permettre de sortir de ce marasme. C’est quelque chose de structuré, avec un chronogramme d’actions qui, à un moment, sera opérationnel et permettra de sortir de cette situation, et qui donnera certainement des résultats, d’ici la fin de cette année.
A votre avis, la relance économique peut-elle se faire sans l’adoption de mesures d’assouplissement pour les entreprises ?
Vous savez, la relance économique s’assimile un peu à un tango qu’on danse à deux : l’Etat et le patronat. Il faut savoir ce qu’on veut : veut-on étouffer les entreprises ou alors désire-t-on qu’elles se maintiennent jusqu’à ce qu’il y ait la relance ? Je pense que non. A partir de là, l’Etat doit faire des efforts et ne pas assommer les entreprises de taxes qui vont les asphyxier et, plus tard, les emmener à fermer. Il faut que l’Etat assouplisse certaines choses pour que les entreprises puissent tenir. Si ce n’est pas le cas, nous vivrons la fermeture de ces entreprises, et si elles ferment, c’est le chômage et s’il y a le chômage, il y aura une insécurité sociale et publique. Ce qui amènera les investisseurs étrangers à dire que le Gabon est un pays à risques. Donc l’Etat doit faire des efforts pour amener les entreprises à produire davantage d’efforts de préservation des emplois. Et comme ça, on aura un maintien pendant un temps jusqu’à ce que la relance intervienne. Si l’Etat baisse les taxes et demande par exemple aux entreprises de ne pas licencier, on aura un statu quo qui permettra à tout le monde de respirer en attendant la reprise, et de préserver la paix sociale.
Vous êtes le patron d’une organisation patronale qui ne représente exclusivement que les opérateurs économiques locaux. Qu’est-ce que les entreprises gabonaises ont de particulier par rapport aux autres ?
Les Gabonais sont totalement absents de l’économie nationale. Ce qui n’est pas normal. C’est dans ce sens et, à partir de là, que l’OPG s’est dit qu’il fallait s’intéresser à ces acteurs qui avaient le courage de s’investir dans le secteur privé, et qu’il fallait faire la promotion de ceux qui se lançaient dans l’entrepreneuriat de manière à ce qu’ils puissent progressivement grignoter des parts de marchés dans l’économie nationale. Nous n’avons pas d’autre choix que de nous battre pour récupérer au moins une partie de l’activité économique de notre pays.
En présentant la géographie des opérateurs économiques au Gabon, et d’après vous, le secteur est aux mains d’entreprises étrangères. Comment l’OPG compte-t-elle intéresser les nationaux à contribuer à la création de richesses ?
Il s’agit pour les nationaux de voir avec les autorités comment renforcer les capacités de ceux qui existent déjà depuis des années et qui éprouvent des difficultés à franchir le pas. Il faut que les autorités aient une politique de renforcement des capacités et amènent les jeunes à s’intéresser à la création d’entreprises. Pour cela, il faut leur dire que la fonction publique n’est pas la seule voie de salut. Notre pays est un pays jeune qui a une forte demande d’entrepreneurs dans tous les domaines. Mais il faut tenir un discours convaincant à ces jeunes, qu’on leur montre où est-ce que cela peut les amener et comment ils peuvent y arriver. Il faut aussi que les autorités mettent en place des facilités qui permettent aux jeunes entrepreneurs de s’installer avec plus de rapidité.
La dette de l’Etat vis-à-vis des entreprises connaît quelques difficultés dans le calendrier d’apurement. Où en est-on avec ce dossier ?
L’OPG en tant que telle n’essaie pas de résoudre ce problème. Nous avons mis en place une coalition qui s’occupe de suivre le règlement de ce dossier. Toutefois, nous espérons que nos dirigeants prendront conscience que cette dette doit être payée. Les chefs d’entreprises doivent tenir le coup jusqu’à ce qu’intervienne la relance économique et pour cela l’Etat doit les aider en réglant cette ardoise. Nous avons des entreprises qui sont concernées, certaines ont déjà été payées et nous osons espérer que lors des prochains échéanciers, le reste fera partie de la liste des entreprises à payer.
SeM
Dans sa dernière parution, le bulletin d’information du Comité d’organisation de la Coupe d’Afrique des nations 2017, le Haut-commissaire au COCAN, Christian Kerangall, revient sur les moments forts de cette compétition que la Gabon a abritée du 14 janvier au 5 février 2017, en même temps qu’il annonce le bilan financier définitif avant le 15 mai prochain.
Quel aura été pour vous, le moment le plus fort en émotion durant cette compétition ? Et le plus négatif ?
Christian Kerangall : Je vais commencer par le moment le plus négatif car la devise du Cocan a été, quelques qu’aient pu être les difficultés durant les presque deux ans de préparation de l’événement : « Positiver et mobiliser ». Nous étions dans un contexte politique tendu par la campagne et surtout la post-campagne… une conjoncture budgétaire difficile du fait de la chute du prix du baril de pétrole, un climat international sécuritaire pouvant susciter des inquiétudes au niveau du terrorisme… Tout cela fait partie de la vie actuelle… mais le plus désagréable, le plus détestable, a été de voir que dans notre propre entourage, dans le propre environnement du chef de l’Etat, certains eurent préféré l’échec de l’événement et la honte pour notre pays.
Par réaction, notre plus grand plaisir a été de constater le jour de la finale, l’apothéose de cette journée où, en plus d’un stade plein, d’un hymne chanté deux fois par notre population, du prénom du Président de la République clamé par la foule, la population toute entière était fière d’elle et de nous. Cette dernière journée a été, de surcroit, enjolivée du plaisir de voir la tête de ceux dont je parlais avant….
Quel est l’intérêt pour vous, de rendre des comptes à la nation gabonaise en déposant, au mois de mai prochain un rapport sur l’utilisation des deniers publics auprès de la Cour des Comptes ?
Je suis un industriel. J’ai été PDG d’un grand groupe. Il est naturel, du fait de la confiance dont l’on m’a honorée, que je rende des comptes. Mais au-delà de cet acte légitime, notre population doit pouvoir apprécier la réalité des dépenses que nous avons réalisées et d’en juger l’opportunité face à tout ce qui a pu être entendu : mensonges, approximations, voire des insultes et calomnies. Je n’ai vu aucun de ses oiseaux de mauvaise augure venir nous dire : « si vous avez besoin de moi, je suis disponible, je suis patriote et prêt à servir mon pays gracieusement».
Le Gabon a aujourd’hui une expertise organisationnelle en matière d’événements sportifs, comment valoriser et revendre cette expertise ?
Cette question est la plus importante des trois pour moi, car le vécu de cet événement, par plus de 10 000 personnes, qui se sont mobilisées sans mesure pour réussir, révèle notre capacité à réaliser de grandes choses si nous croyons en nous-mêmes et en notre pays. Ainsi, j’espère que tous les jeunes qui nous ont accompagnés, auront eu un éveil et une attirance pour les multiples métiers qui peuvent leur permettre, au-delà de se nourrir, vivre une passion demain.
Je ne peux énumérer tous ces métiers, je n’en citerai donc que quelques-uns: les métiers de l’évènementiel, les métiers du sport, ceux de la retransmission de l’image et du son, ceux de la création et de l’entretien des pelouses, ceux de la logistique et des transports, de l’hébergement et de la restauration etc...
Stéphane Billé
Après Paris, le 30 septembre 2016, les ministres des finances 15 Etats africains, regroupés au sein de l’UEMOA et de la CEMAC, ont tenu leur réunion biannuelle, ce 14 avril, à Abidjan.
Durant ce conclave, ces plénipotentiaires ont discuté de l’avenir de la Zone franc, de la situation économique de ces deux grandes zones économiques, du renforcement du socle de la coopération monétaire et promotion des échanges commerciaux, de la gouvernance économique, monétaire, financière ainsi que de la coopération et l’intégration économique entre ses membres.
Dans un contexte économique marqué par des incertitudes au plan international comme régional, les ministres des finances, les gouverneurs des banques centrales et les présidents des institutions régionales ont réaffirmé leur attachement au principe de solidarité régionale afin d’apporter des réponses concertées et communes aux défis économiques, sociaux et sécuritaires que certains Etats rencontrent. Au cours de réunion, les participants à la réunion ont aussi relevé le recul de la convergence nominale comme de la convergence réelle au sein de la Zone franc au cours de l’année 2016.
Les échanges ont également porté sur les indicateurs de convergence budgétaire en raison du creusement des déficits publics dans tous les Etats la Zone franc, ainsi que la hausse du niveau d’endettement, dû notamment aux politiques d’investissement public et aux chocs exogènes que certains Etats rencontrent. De ce fait, ils ont ainsi réitéré leur attachement à réduire les déséquilibres budgétaires afin de garantir le bon fonctionnement des unions monétaires et de préserver la soutenabilité des trajectoires de développement.
Le regard porté sur la convergence réelle a permis de constater qu’elle ne progresse que lentement dans la Zone franc. Ce qui témoigne, ont-ils expliqué, de la présence de nombreux écueils que rencontre le processus d’intégration régionale. Dans ce contexte, ils ont souligné la nécessité de poursuivre la mise en œuvre des mesures permettant de renforcer cette intégration régionale, facteur de résilience et de solidarité des Etats de la Zone franc face aux chocs exogènes négatifs.
La présence des pays africains sur les marchés financiers internationaux, dans un contexte de recours croissants aux obligations internationales au cours des dernières années a été abordée. Ils se sont accordés sur un ensemble de principes, tirés de l’expérience des pays africains sur la période récente, relatifs au recours aux émissions sur les marchés financiers et au financement soutenable du développement.
Les participants à la réunion ont enfin échangé sur l’initiative Compact with Africa du G20, visant à accroître l’investissement privé, notamment dans les infrastructures, dans les pays d’Afrique subsaharienne. Plusieurs Etats de la Zone franc ont manifesté leur intérêt pour participer à cette initiative, et précisé leurs intentions et leurs attentes. Sur ce dossier, les participants ont formulé le vœu que ces travaux du G20 débouchent sur des actions concrètes, témoignant de la mobilisation de tous les partenaires des pays africains au service du développement du continent.
Au terme de cette réunion, les participants ont accepté l’invitation des autorités françaises de tenir la prochaine réunion des ministres des finances de la Zone franc à Paris.
Stéphane Billé
Vous avez effectué une visite dans les compagnies minières basées dans le Haut-Ogooue avec le Premier ministre, il y a quelques semaines. Quel était l’objectif de cette descente sur le terrain ?
Avant de développer votre question, je voudrais rappeler que le Premier ministre s’est rendu à Owendo, pour visiter les ports minéraliers qui sont des infrastructures nouvelles et qui vont accélérer les cadences d’exportation de nos minerais. Le secteur minier ne peut mieux prospérer que si les capacités d’exportation sont disponibles. C’est le cas de rendre hommage à cet investisseur pour la réalisation de ce port minéralier en partenariat public-privé, et qui va permettre de recevoir l’ensemble des productions minières du sud du Gabon.
Pour ce qui est de la descente à Moanda, le Premier ministre a tenu à mettre son doigt sur la réalité du cluster minier Moanda-Franceville qui est en développement en ce moment. Le cluster minier Moanda-Franceville comprend le développement et l’intensification de la production de manganèse de Moanda et la découverte de nouveaux sites miniers du côté de Franceville. Nous avons également rencontré l’ensemble des opérateurs de la filière afin de toucher du doigt les réalités du secteur, les projets développés par les opérateurs et les perspectives. Et nous nous sommes réjouis dans le cadre de Noga Mining, qu’il y ait un nouvel opérateur qui est en train de s’installer dans le Haut-Ogooue avec une capacité de production actuelle de 300 000 tonnes de manganèse par an, qui viennent s’ajouter à ce qui se fait déjà. L’entreprise Noga Mining dans sa perspective de développement, envisage d’implanter une usine qui va développer près de 2 millions de tonnes de manganèse par an qui vont s’ajouter à la production actuelle du Gabon et consolider la position de leader de notre pays dans les exportations de manganèse.
On parle ces derniers temps de la relance de l’économie nationale. S’agissant de votre département ministériel, en quoi consiste sa stratégie pour contribuer à ce programme gouvernemental ?
Le secteur minier a sa partition à jouer dans le cadre de la relance de notre économie. Et notre stratégie vise à attirer des investissements directs étrangers. Ce qu’il faut rappeler c’est que le Gabon regorge de ressources minérales, mais qui n’ont pas été suffisamment valorisées. Tous les investissements miniers que nous avons reçus jusqu’à cette date, n’ont pas permis de déceler l’ensemble des ressources minérales dont regorge notre pays. Donc l’une des missions que nous avons reçues, c’est de renforcer l’inventaire des ressources minières susceptibles d’être développées par des opérateurs économiques, mais aussi d’en faire la promotion.
Vous parlez très souvent d’attractivité en quoi consiste-t-elle effectivement ?
L’attractivité, c’est d’abord connaître notre ressource, savoir ce que nous avons pour pouvoir la faire connaître et attirer des investissements directs étrangers. Ceci ne s’adresse pas seulement aux investisseurs étrangers, mais également aux Gabonais, soucieux de se lancer en affaires dans les métiers de la mine. L’attractivité concerne également l’allègement des procédures administratives, un assouplissement des mesures dans la transparence afin de pouvoir rassurer la plupart des opérateurs du secteur pour qu’ils viennent au Gabon.
L’objectif vise à vulgariser l’économie minière et les métiers de la mine. Parce que beaucoup pensent que la mine nécessite de gros investissements. Mais elle peut également intéresser de petits opérateurs intéressés à valoriser nos ressources qui sont de l’or, du fer, du manganèse parce qu’il y a encore des carrières de manganèse à ouvrir, des carrières de cobalt et bien d’autres ressources qui s’offrent à la fois aux investissements directs étrangers et aux opérateurs locaux.
Comment s’articule le développement du secteur minier au Gabon aujourd’hui ?
Le développement du secteur minier se fait sous l’autorité du président de la République qui croit fermement, à l’instar de ce que les autres pays ont réalisé, que les mines gabonaises sont capables d’apporter énormément de bien-être aux populations gabonaises. Je parle de la contribution au niveau du budget de l’Etat, de la contribution pour le bien-être, de la contribution à la croissance inclusive, donc dans les périmètres où se développent ces mines. Les mines apportent une contribution au PIB qui tourne autour de 2%. L’objectif à moyen terme est de la porter à plus de 5% et de l’accroître parce que le Plan stratégique Gabon émergent attend que les mines apportent une contribution plus importante à l’horizon 2025.
Les mines sont une opportunité pour tous les Gabonais, parce que le chef de l’Etat y croit et il a dressé des instruments clairs et fixé des objectifs à atteindre. C’est également l’opportunité pour attirer des investissements directs étrangers parce qu’au regard de notre relief, de notre climat, de l’étendue et de l’absence de certaines infrastructures, cela s’adresse à des investisseurs directs étrangers et nous avons surtout des ressources stratégiques abondantes qui peuvent intéresser des investisseurs directs étrangers. Ce sont également des opportunités de création d’emplois et de carrière pour nos jeunes compatriotes qui vont sortir de l’Ecole des mines et de métallurgie de Moanda et qui s’adressent également aux miniers, aux géologues et à un éventail de cadres gabonais qui doivent venir nous rejoindre dans le processus de valorisation de la mine.
Dans cet environnement, quelle est la valeur ajoutée de la société équatoriale des mines ?
La société équatoriale des mines joue un rôle central dans le développement du secteur minier dans notre pays. Elle a une valeur stratégique. L’Etat a besoin d’un opérateur pour porter ses parts dans les entreprises qui opèrent dans le secteur au Gabon, et c’est donc le rôle de cette société de représenter l’Etat dans le capital de ces structures à l’instar de la Comilog et bien d’autres, de détenir ses parts et de les rentabiliser.
On a l’impression qu’elle n’est pas très visible sur le terrain et dans le paysage minier…
Aujourd’hui, la société équatoriale des mines, bien qu’elle ait été mise en place en 2012, présente un bilan qui n’est pas suffisamment visible par tous les acteurs et les citoyens, parce qu’elle n’a pas reçu toutes les diligences que doit lui concéder l’Etat et dont elle a besoin pour son développement. Notre mission aujourd’hui vise à réunir toutes les conditions techniques, les ressources humaines et financières pour permettre à cette société de jouer ce rôle de pendant des opérateurs miniers.
L’une des décisions que vous avez prises dans votre département ministériel c’est l’interdiction de l’exploitation illicite des granulats, des sables de carrière. Où en est-on ?
L’interdiction de l’exploitation des granulats dans le nord de Libreville et des carrières illicites fait justement partie des mesures que nous avons prises à notre arrivée. C’est-à-dire que nous avons des opérateurs qui exploitent de manière illicite des carrières de sable, de gravier, ou qui obtiennent des autorisations illicites pour creuser du sable dans le nord de la capitale, qui déplacent des pierres sans autorisation préalable de l’Etat. Et nous luttons contre ces exploitations illicites parce qu’il faut que les gens sachent que l’économie minière doit être citoyenne. C’est-à-dire que les acteurs qui sont concernés par l’exploitation des ressources minières doivent être citoyens : respecter la loi, respecter l’environnement, respecter le cadre dans lequel ils exercent ces activités minières.
L’interdiction visait quoi exactement ?
Nous avons pris des mesures de suspension de certaines carrières pour nous permettre de mener un audit en interne pour identifier les faiblesses au niveau du dispositif et nous avons commencé à rédiger un certain nombre de procédures qui sont en expérimentation, et voir comment les opérateurs réagissent à ces procédures. L’objectif est simple : exploiter la terre du Gabon, qu’il s’agisse du caillou ou du sable, doit obéir à un cadre. Celui-ci tient au cahier des charges conçu par les autorités et qu’il faut respecter. Qu’il s’agisse d’un exploitant dans le régime des mines ou dans le régime des carrières, l’objectif c’est de faire respecter le cadre. Et ce cadre va de plus en plus être exigible dès lors que nous attendons des mines une contribution beaucoup plus forte dans le produit intérieur brut, une contribution plus forte au niveau de la relance économique, une contribution plus forte en termes de créations d’emplois, en termes d’investissements, et de bien-être des populations.
L’autre disposition qui va être ajoutée, c’est celle qui va consister à intensifier les contrôles pour que les opérateurs économiques que nous avons, qu’ils soient gabonais ou des frères qui viennent d’autres pays pour renforcer la force de travail, respectent le code minier, les dispositions réglementaires, sociales et sociétales dont il est de notre responsabilité de veiller.
Auxence Mengue (avec la presse locale)
Régissant à la rumeur faisant état de son limogeage du gouvernement pour certains et de changement de portefeuille pour d’autres, le ministre de l’Education nationale, Florentin Moussavou a tenu à faire une mise au point, afin de préciser un certain nombre de dispositions
A l’attention des syndicalistes qui réclament à tout prix son limogeage suite à ses prises de positions, et les sanctions prises contre les enseignants grévistes, Florentin Moussavou s’est voulu direct et sans équivoques précisant qu’il restait en phase avec les idéaux du gouvernement ainsi qu’avec les objectifs à lui assignés par le chef du gouvernement. «Il me revient que certains esprits malsains auraient souhaité mon éviction du gouvernement. Qu’ils soient patients, j’y suis toujours pour servir mon pays et non me servir.» a-t-il précisé. Avant de rappeler son attachement à la formation des Gabonais. «Le bien-être de l’école gabonaise m’importe plus que tout.», a-t-il conclu.
Pour rappel, la grève des enseignants du secteur public a atteint des proportions alarmantes ces derniers jours. L’appel à la grève de la Convention nationale des syndicats du secteur de l’éducation (Conasysed) et du Syndicat de l’éducation nationale (SENA), les deux principaux syndicats de l’éducation nationale est largement suivi. Ces deux mouvements avaient demandé à leurs adhérents de boycotter la rentrée scolaire pour exiger le paiement des primes, des intégrations, l'amélioration des conditions de travail et surtout des nouvelles salles de classe. Ils sont en grève depuis le mois de novembre pour la plupart d’entre eux.
Conséquences, les élèves ne vont plus à l'école depuis plusieurs semaines. Bref, la situation se corse. Pour ramener les enseignants dans les salles de classe, Florentin Moussavou, ministre de l'Education nationale, excédé par l’intransigeance des syndicalistes, après un certain nombre d’efforts fournis pour renouer les fils du dialogue, a finalement brandi la chicotte après la carotte. Dans une note circulaire, il a menacé de radier tous les enseignants absents de leur poste depuis trois mois, et procéder à la suspension des salaires des grévistes.
Les élèves, première victimes de cet enlisement
En effet, la bataille qui oppose le gouvernement aux enseignants en grève depuis trois mois ne manque plus d’alimenter les inquiétudes des élèves et des parents. Car, si personne n’avait jusque-là osé en parler ouvertement, désormais le risque d’une année blanche devient de plus en plus grand, à mesure que les jours passent et que l’année file inexorablement vers sa fin. Avec d’un côté l’intransigeance des syndicalistes déterminés coûte-que-coûte, à aller jusqu’au bout, et de l’autre, un gouvernement visiblement excédé par les évènements. En un mot, l’école gabonaise est prise entre le marteau et l’enclume.
La dragée semble donc amère pour les parents d’élèves et leurs enfants. Les parents d’élèves qui semblent avoir pris conscience de la gravité de la situation multiplient des sorties et autres réunions, appelant la Conasysed et le gouvernement à mettre, chacun un peu d’eau dans leur vin, afin de reprendre le dialogue et épargner le risque d’une année blanche à leur progéniture.
D’ailleurs les élèves eux-mêmes pour l’avoir compris ont acquis des rôles dans ce feuilleton. Depuis quelques jours, ils investissent la rue pour exiger du gouvernement qu’il prenne à bras-le-corps les revendications des enseignants, afin de permettre au plus vite la reprise des cours.
Appel au compromis
Faute de compromis, chaque camp semble privilégier le jusqu’au-boutisme. Selon certains observateurs, «face à cet enlisement, il importe que les deux parties puissent reprendre le fil des discussions». Tout comme ils en appellent à une réelle prise de conscience professionnelle de la Conasysed dont la vocation première, est d’enseigner et de former.
Ils invitent enfin, « les deux parties à faire chacune des compromis, au regard de la conjoncture exceptionnelle que travers le pays. Surtout poursuivent-ils « qu’il sort très affecté d’une élection présidentielle atypique. Une année blanche ne serait qu’un coup de grâce porté à un climat sociopolitique déjà bien précaire».
Synclair Owona
A la suite de la reprise du service par les magistrats du Gabon, Germain Nguema Ella, le président du Syndicat national des magistrats du Gabon (Synamag), par ailleurs inspecteur des services juridiques au Tribunal de Libreville, revient sur les mobiles de la suspension de leur mot d’ordre de grève lancé en décembre 2016.
Quelles sont les raisons de la levée du mot de grève générale lancé par le Syndicat national des magistrats du Gabon (Synamag), en décembre 2016 ?
Germain Nguema Ella : Le mot d’ordre de grève a été levé parce nous estimons qu’il y a eu des avancées significatives dans le sens que nous avions demandé à la tutelle, avec la résolution de six points de notre cahier de charges qui en contient une trentaine. Les six points ont été brandis, parce que nous estimions qu’ils pouvaient être résolus sans besoin de commissions.
De ces six points, nous avions la situation des magistrats du tribunal administratif de Port-Gentil et Franceville dans le sens que ces tribunaux n’ont pas de locaux. Nous avons demandé qu’il y ait des locaux et que les jeunes collègues puissent travailler à partir de l’année prochaine. La tutelle nous a désigné des locaux à Port-Gentil et à Franceville. Elle a fait des conventions avec une société de la place qui devra préfinancer les travaux dont le démarrage est prévu pour le mois d’avril pour un délai de six mois avant la livraison. Nous avons donc trouvé que c’était une avancée.
Il y a le problème des tribunaux ou des juridictions administratives au niveau de Libreville. Vous savez, le Tribunal et la Cour d’appel de Libreville se trouve ici et le parquet du tribunal est logé dans un immeuble qui a servi, il n’y a pas longtemps, de motel. Vous imaginez qu’il ne s’agit pas là, des conditions les plus admirables pour le travail des magistrats. Nous avons voulu qu’on nous remette l’immeuble de Batterie 4 où le ministre de la Justice travaillait, en attendant qu’on trouve une solution à ses bureaux au niveau du ministère de la Justice. Effectivement, le ministre est parti de là dimanche. Ces locaux sont désormais à la disposition des juridictions administratives. Il reste cependant un écueil : il concerne le ministère de l’Egalité des chances qui y réside toujours. Nous sommes néanmoins convaincus qu’avec le départ du Gardes des sceaux, le ministre de l’Egalité des changes « trouvera une chance » ailleurs. Voilà pour ce qui est des juridictions administratives.
Qu’en est-il de la Prime d’incitation à la performance (PIP), qui constituait un autre point d’achoppement ?
Au niveau de la PIP, une partie a été payée à la fin de la semaine dernière mais il reste une autre partie. Il y avait des arriérés qui concernaient deux trimestres. Le dernier trimestre de décembre 2015 a été payé et il reste celui de 2014. A ce niveau, nous avons aussi estimé qu’il y a également eu une avancée.
La deuxième partie de la PIP ne pourrait pas constituer un autre prétexte pour redescendre dans la rue ?
Si quelque chose est partiellement réglé, et que le reste ne fasse pas l’objet d’une attention particulière, il est logique cela puisse entrainer une grève. Parce qu’il faut tout régler à 100%. Nous avons laissé deux mois à la tutelle pour pouvoir essayer de trouver la solution à ce problème. Si c’était seulement pour faire du dilatoire dans le sens qu’ils estiment qu’en réglant partiellement le problème, le reste ne sera pas fait, c’est sûr qu’après deux mois, nous allons faire un état des lieux. Et si nous constatons que la volonté n’y est pas… Vous savez, nous avons suspendu la grève. Ce qui veut dire que le préavis reste valable, vu que si nous constatons la mauvaise foi de la tutelle, nous reprendrons la grève.
On va même faire un échéancier signé des deux parties, du syndicat et de la tutelle, sur les délais. Comme vous le savez, dans toutes les conventions, c’est la loi des parties qui est de mise, surtout que nous n’avons pas trop d’engagements. Le nôtre est de retirer notre mot de grève et celui de la tutelle, est l’obligation de faire en sorte que ce que nous réclamons soit fait.
Qu’en est-il du troisième point de vos revendications qui concernait le décret 404 ?
Il y avait le décret 404 relatif aux nouvelles rémunérations. Cette revalorisation a touché tous les fonctionnaires, à l’exception des magistrats hors-hiérarchie. Il semble que le ministère de la Fonction publique n’aurait pas fait appliquer ce nouveau décret aux magistrats hors-hiérarchie. Nous ne savons pas les raisons de cette discrimination. Ce décret permet aux hauts magistrats d’avoir une bonification dans leurs salaires, et avec une répercussion au niveau de leurs pensions. Ce, du fait que ces hauts magistrats hors-hiérarchie, sont vers la fin de leur carrière. Il faut donc aussi voir leur fin de carrière et la situation de leur retraite. En appliquant ce décret, on aura l’amélioration de la pension des magistrats. A partir du mois de mars, ce décret sera désormais applicable aux magistrats hors-hiérarchie. Nous estimons que nous avons également eu un autre acquis.
Quid de la situation des toges ?
Effectivement, nous avons demandé 430 toges. Nous en avons reçu près de 100 pour les jeunes magistrats de la Promotion 2016, qui ont été affectés. Tous ont reçu leurs toges. Dans les 430 toges, il faut concevoir qu’il y a non seulement les magistrats mais aussi les greffiers. C’est aussi une avancée. Nous attendons maintenant le reste, qui sera beaucoup plus distribué aux magistrats qui quittent le tribunal pour la Cour d’appel. Il faut tout de même relever que ces robes ne sont pas identiques. Surtout les robes d’apparat, lorsqu’on est au Tribunal et à la Cour d’appel, ce qu’on appelle souvent les robes rouges.
S’agissant ces affectations ?
S’agissant de ce dernier point qui concernait l’irrégularité d’affectation des magistrats du judiciaire à la Cour d’appel administrative de Libreville, je crois que ce point ne pourra être résolu que lors de la tenue d’un Conseil supérieur de la magistrature. D’ailleurs, sur ce point, le ministre nous a donné sa conviction d’y tenir à la fin de l’année judiciaire.
Quelles garanties donnez aux justiciables ?
Si la grève a été suspendue, c’est pour deux causes. La première, c’est pour notre revendication personnelle. On peut reconnaitre que toute organisation syndicale est égoïste sur ce plan, elle essaie de trouver des solutions à ses problèmes, rien que dans le cadre de sa profession. La seconde, c’est le du cri du peuple. Si nous avons compris que si nous tenons à ce qu’il y ait une amélioration dans les conditions de travail et de vie pour les magistrats, nous avons également compris que cette grève trahissait la situation de nos compatriotes, parce qu’ils n’avaient plus accès à nos services. Même l’obtention d’un casier judiciaire était devenue compliquée. Vous savez que lorsqu’il y a des examens ou n’importe quoi, cette pièce fait partie des éléments qui permettent de poser sa candidature.
Sur un tout autre plan, les prisons sont complètement pleines. On y incarcérait des gens, alors qu’il n’y avait plus d’audiences. Il a donc fallu qu’on résolve ce problème. Parce que le problème qui se posait ne touchait pas d’abord la hiérarchie, mais le bas peuple. Il fallait donc voir tout cela, parce que lorsqu’un magistrat rend un jugement, il dit au nom du peuple gabonais. A un moment donné et indépendamment de nos revendications, il fallait faire en sorte qu’il y ait cet assouplissement et que les gens aient à nouveau accès à nos services.
Synclair Owona
Au cours de l’exercice 2016, l’administration fiscale a accusé un déficit de 410,8 milliards de Fcfa. Ainsi, sur les 1443,2 milliards de Fcfa attendus des services de l’assiette, à peine 1000 milliards de Fcfa sont tombés dans l’escarcelle de l’Etat. Dans le détail, les Impôts devaient contribuer à hauteur 1002 milliards de Fcfa tandis que la douane devait apporter plus de 400 milliards de Fcfa.
La douane a sauvé l’exercice en réalisant un chiffre de 355 milliards de Fcfa alors que l’administration des Impôts a vu ses performances piquer du nez. La faute à plusieurs facteurs à la fois exogènes et endogènes, qui handicapent les performances d’un pays accroché à la mamelle nourricière du pétrole depuis des années. Une illusion rentière qui tend à se dissiper au regard de la conjoncture défavorable à laquelle pays fait face depuis 2014.
Changer de paradigme
Aussi le Premier ministre, Emmanuel Issoze Ngondet indique-t-il qu’il va falloir « changer de paradigme », question de s’émanciper de la tutelle pétrolière dont le pays a du mal à se sevrer, en mettant un accent particulier sur la collecte des recettes fiscales et douanières. L’Etat semble ainsi avoir pris conscience des recommandations du FMI qui préconisent une rationalisation des dépenses mieux et une meilleure collecte.
Aussi, pour ce dernier volet, le bailleur de fonds qui assure la surveillance multilatérale des économies dans le monde, exhorte le Gabon à faire un état des lieux de la nature et du mode d’emploi de la collecte de ses recettes fiscales.
Pour la première recommandation, le défi réside dans la capacité du pays à s’ajuster. Car, percevoir davantage implique dans un premier temps, que l’on parvienne à une réduction de l’utilisation généralisée des exonérations fiscales et douanières discrétionnaires, complaisantes et fantaisistes.
Celles-ci compromettent les recettes globales de l’État et affaiblissent la gouvernance. Pour ce qui concerne le Gabon, plusieurs parlementaires se sont indignés de cette situation lors de la séance d’adoption de la loi des finances 2016 au Parlement.
Elargir l’assiette fiscale
Le deuxième défi que lance le Fonds monétaire international au Gabon réside dans sa capacité à élargir son assiette fiscale, question de disposer de ressources fiscales additionnelles. Ce qui, pour une économie traditionnellement rentière et qui tourne progressivement le dos à la manne pétrolière, constitue un préalable. Car, selon les experts du Fonds monétaire international, dans la plupart des Etats de la sous-région, les recettes non pétrolières se sont améliorées. Celles-ci devraient afficher une progression par ces temps de baisse des recettes pétrolières.
Mais, pour le gouvernement gabonais, cette perspective déjà actée dans le projet de loi des finances 2017, constitue un défi pour les deux administrations que sont les Impôts et la douane.
Le gap de l’exercice écoulé est encore frais dans les mémoires et pour cela, les autorités veulent passer à la création à la création d’un office central des recettes. Une super structure qui centralisera les recettes de toute l’administration fiscale et mettra l’Etat à l’abri du déficit de bonne gouvernance qui caractérise du système de mobilisation des recettes fiscales et douanières émaillé par des détournements de recettes.
En fait, l’Etat qui mise sur cette entité pour accroître ses recettes fiscales, indique que la mise en place de cet office comporte une dimension fiscale, porteuse de ressources supplémentaires, une dimension économique favorable à l’amélioration du climat général des affaires et de la qualité de service aux contribuables et, enfin, une dimension politique et administrative qui permet de lutter contre la fraude fiscale et la corruption.
A la suite de cette option, le gouvernement engage le processus de l’élargissement de l’assiette fiscale par la création de trois nouveaux impôts dans la loi des finances 2017. Pour atteindre ses objectifs, l’Etat pondère ses recettes fiscales à 1 289 milliards de FCFA pour l’exercice 2017.
La Contribution à la formation professionnelle (CFP) supportée par les PME, la Contribution spéciale de solidarité (CSS) et de la Taxe forfaitaire d’habitation (TFH) sont les nouveaux impôts auxquels l’Etat soumet les entreprises cette année.
Imprudence de l’Etat
Déjà décriée par les opérateurs économiques, la politique fiscale de l’Etat ne fait pas l’unanimité. Car, les PME, surendettées et asphyxiés par la dette de l’Etat, mettent à l’index la générosité du gouvernement vis-à-vis des entreprises installées à la zone économique spéciale de Nkok.
Sans leur donner raison, le Premier ministre Emmanuel Issoze Ngondet estime qu’il faut apporter des correctifs à cette politique par trop généreuse qui lèse les caisses de l’Etat et fragilise certains segments productifs de l’économie.
«L’Etat gabonais a consenti, à ce jour, d’importantes sommes au titre de dépenses fiscales destinées à encourager les investissements dans des secteurs clés. Mais, force est de constater et de reconnaître que nous n’avons pas eu de suivi sur l’impact de ces dépenses en termes de réinvestissement», reconnaît le chef du gouvernement.
A Nkok par exemple, les abattements fiscalo-douaniers vont de l’exemption d’imposition sur les dividendes et le foncier, au rapatriement de la totalité des bénéfices issus des activités, en passant par les exonérations fiscales et douanières sur les revenus de l’entreprise pendant 10 ans.
Elles sont fixées à 5% au bout de cette période pendant cinq ans et sont plafonnées au régime normal 16 ans seulement après, après avoir bénéficié de l’électricité subventionnée, etc.
Cette «imprudence» de l’Etat se mesure aujourd’hui à l’aune des emplois créés au sein de cette zone : 3000 emplois pour des centaines de milliards d’exonérations fiscales.
Alors que faire ? Des voix s’élèvent dans la haute administration et chuchotent au sujet de l’augmentation de certaines taxes ou la création d’autres. Mais les patrons ne l’entendent pas de cette oreille et crient à la pression, voire la répression fiscale.
Mais le gouvernement a lancé une réflexion sur la fiscalité et la parafiscalité lors de la tenue du Haut conseil pour l’investissement dans un contexte marqué par une crise qui secoue tous les secteurs de l’économie nationale.
Auxence Mengue
Le directeur dépositaire central à la Bourse des valeurs mobilières d’Afrique centrale (BVMAC) expose sur les avantages qu’offre l’opération de titrisation de la dette publique. Il présente les différences et les similitudes entre les divers mécanismes de recyclage de la dette.
Le Nouveau Gabon : Quel avantage présente la titrisation de la dette due aux entreprises par l’Etat?
Frédéric Yifomnjou : Le principal avantage c’est que les entreprises, lorsqu’elles détiennent des créances auprès de l’Etat, ces créances sont considérées comme des actifs illiquides. Bien sûr ce sont des actifs certes financiers, mais des actifs illiquides. Les entreprises ne peuvent pas mobiliser ces créances auprès d’une banque pour obtenir une avance ou tout autre financement. Dans le cadre de la titrisation, ces créances sont transformées en titres négociables. Et dans le projet en cours mis en place par le ministère de l’Economie, la titrisation offre aux détenteurs de titres un certain nombre d’emplois. Les titulaires de ces titres par exemple pourront les revendre auprès d’un agent à capacité de financement pour accéder aux ressources financières. Les entreprises peuvent également utiliser ces titres comme collatéral auprès des banques c’est-à-dire qu’elles peuvent nantir ces titres pour obtenir un crédit, elles pourront utiliser ces titres comme caution dans les marchés publics et même pour régler les arriérés d’impôts auprès de l’administration fiscale.
FY : Au-delà de ces avantages qu’offre la titrisation, est-ce que les entreprises gabonaises, aujourd’hui asphyxiées par les arriérés de paiement de l’Etat, ont suffisamment le courage pour d’attendre l’issue de ces échéances ?
C’est la raison pour laquelle j’insiste sur l’une des stratégies d’allocation des titres. Cela revient à dire qu’il ne faut pas donner une seule ligne de valeur mobilière qui porterait peut être sur cinq ou dix ans à ces titres. Mais l’on peut proposer plusieurs tranches de valeurs mobilières. Ce qui signifierait par exemple que si une entreprise a une créance de 50 milliards de FCFA auprès de l’Etat, on ne remettra cinquante titres d’une valeur de 1 milliards de Fcfa, avec une maturité unique. Mais par contre, ce seront plusieurs titres avec des maturités différentes. Donc, si c’est cinquante titres d’une valeur d’un milliard, on peut remettre 10 titres pour d’une maturité d’un an, 10 autres titres avec une maturité de deux ans, 10 autres titres avec une maturité de trois, quatre ou cinq ans. Ça permet à l’entreprise de mieux planifier l’entrée de ses ressources. Donc on peut gérer cela en étalant sur plusieurs années, au lieu de le faire sur une seule année.
FY : On sait que la cession des titres entraîne souvent une décote de leurs valeurs ; est ce que l’Etat peut garantir ou encadrer les transactions sur le marché secondaire ?
La décote résulte parfois de la négociation entre le créancier de l’Etat qui possède les titres, et l’investisseur qui veut les racheter. Ainsi par exemple, il s’agira pour l’investisseur ou le créancier de dire : « écoute, j’ai confiance en l’Etat, je sais que l’Etat va me payer mes titres. Si vous voulez les racheter, c’est parce que vous en avez besoin et je peux vous accorder tel niveau de décote ». Mais, dans le cadre de la mise en place de l’opération, qui est encore dans sa phase initiale, l’Etat peut encadrer les transactions sur ce marché et limiter ainsi les décotes possibles. L’Etat pourrait par exemple dire que pour les titres d’une maturité de deux ans, la décote est limitée à 10% ; les titres d’une maturité de trois ans, bénéficieront d’une décote de 20%. L’Etat, dans son rôle régalien, peut limiter ou encadrer ces opérations sur le marché secondaire.
FY : A quel niveau se trouve la conception de ce projet qui engage l’Etat gabonais et la BVMAC ?
Nous sommes dans sa phase initiale. En fait, avant de travailler dans une équipe, il faut que les gens puissent se familiariser avec un certain nombre de concepts, assimiler un certain nombre de mécanisme. C’est l’une des raisons pour laquelle nous avons organisé un séminaire il y a quelques semaines. Après cette phase, il y aura certainement une formation avec les créanciers de l’Etat pour qu’ils puissent également avoir l’information exacte sur ce mécanisme. C’est après cela qu’on pourra mettre les équipes d’intervention qui vont travailler dans ce projet.
FY : Quelles sont les différences qui existent entre la titrisation et les autres mécanismes de recyclage de la dette ?
La différence entre la titrisation et les autres mécanismes de recyclage de la dette réside dans la capacité du titulaire à négocier ou pas. Il y a par exemple le rééchelonnement, qui est l’un des mécanismes les plus utilisés et qui consiste à différer le règlement d’une dette de quelques années. La différence par exemple entre ce mécanisme et la titrisation- qui elle-même est une sorte de rééchelonnement, c’est qu’on reçoit des titres ou des instruments financiers qui ouvrent la voie à une négociation sur un marché secondaire et autre. Ce qui n’est pas possible dans le cadre du rééchelonnement où l’on reste prisonnier des actifs dont on est titulaire.
Dans une interview accordée à notre rédaction, Aida Diarra, Vice-Présidente Afrique de Western Union revient sur les principales raisons qui ont causé la résiliation du contrat avec la Banque internationale pour le commerce et l’industrie du Gabon ainsi que sur les activités et les perspectives de ce service au Gabon.
Le Nouveau Gabon : Le Gabon est un partenaire de Western Union depuis plusieurs années grâce aux différentes agences implantées sur l'ensemble du territoire national. Pourriez-vous nous dresser un rapide historique de ce partenariat?
En effet, le Gabon est un pays très important pour Western Union. Nous n'avons eu de cesse de capitaliser sur nos agents pour développer notre réseau qui compte aujourd’hui, plus de 50 points de vente. Depuis l'ouverture de notre toute première agence, nous avons donc étendu notre présence physique, mais aussi diversifié notre offre de services. Nous sommes dans une logique d'essor continu du réseau et d'élargissement de notre gamme de service électroniques et digitaux.
Dans le cadre de cette dynamique, nous avons eu le plaisir d’accueillir Hikmet Ersek, Président directeur général de Western Union Monde à Libreville, l’année dernière pour célébrer notre 20ème anniversaire au Gabon et en Afrique. Cet événement témoignait de notre engagement continu et notre confiance en l’avenir concernant nos activités dans ce pays.
Quelles sont vos perspectives à court et moyen terme au Gabon?
Western Union a toujours cru aux opportunités de développement de ses services de transfert d’argent au Gabon, et continuera de s’y tenir. Récemment, nous avons lancé un service qui permet d’envoyer de l’argent au pays directement sur un compte bancaire ou un porte-monnaie mobile. Cette offre est disponible dans plus de 48 pays dans le monde. Nous comptons poursuivre le développement de notre réseau au Gabon et élargir aussi notre gamme de services en développant de nouvelles options pour nos clients.
Depuis le 09 octobre 2016, les services Western Union ne sont plus disponibles aux guichets des agences de la Banque internationale pour le commerce et l’industrie du Gabon. Quelles sont les raisons de cette suspension d’activités ?
En ce qui concerne la décision de la BICIG de suspendre ses activités de transfert d’argent au Gabon, il s’agit d’un choix propre à cet agent. Cette décision n'est aucunement liée à un dysfonctionnement ou difficulté entre les deux parties. Pour ce qui nous concerne, les services Western Union sont toujours à la disposition de la clientèle dans notre réseau d'agents, soit plus de 50 points de vente sur le territoire gabonais.
Il semblerait néanmoins que cette situation ne concerne pas exclusivement le Gabon. Des décisions de ce type sont également pressenties outre-Atlantique, notamment aux Etats-Unis. Pourriez-vous nous éclairer sur ce point ?
Nous ne sommes pas en mesure de répondre à cette question. Il serait préférable de vous adresser aux responsables de la BICIG pour obtenir des informations.
Mais ne pensez-vous pas que cette situation risque d’entraîner un effet domino sur le reste des guichets utilisés par vos services au Gabon ?
La situation de la BICIG n’est aucunement liée à l’activité de Western Union au Gabon et dans le monde. Nos services sont toujours disponibles dans tous nos points de ventes du pays, et ce, sans aucune difficulté.
En terme d’impact et notamment de manque à gagner, à combien peut-on évaluer cette cessation de collaboration avec la BICIG ?
Je ne pourrais malheureusement pas donner des détails chiffrés, mais ce que je peux vous affirmer est que notre Business au Gabon reste équilibré.
Synclair Owona
Face à une conjoncture internationale marquée par un prix du baril du pétrole très bas et une situation interne qui incite à la prudence en matière de gestion des deniers publics, les autorités gabonaises avaient initié une réforme de la Direction générale du budget qui semble apporter des solutions aux multiples disfonctionnements qui avaient affaibli cette administration.
Cette réforme a abouti, il y a deux ans, à la fusion des trois anciennes Directions générales intervenant dans la phase administrative de la dépense publique (Budget ; Contrôle des ressources et des Charges publiques ; Marchés publics) en une seule entité. Cette fusion était également nécesaire à la création d’un « Guichet et interlocuteur unique », avait pour but de répondre aux préoccupations des usagers du service public qui étaient souvent confrontés à un circuit de dépense trop complexe, lent et source de beaucoup d’incompréhensions. Autant de lacunes qui obturaient la marche vers une meilleure qualité des services publics.
Une mutation appelée à se poursuivre
Au sein de la DGBFI, l’heure est à la satisfaction, mais toujours à la prudence. Car, si aujourd’hui l’institution est désormais recentrée sur sa principale mission, tout en poursuivant ses efforts afin de réaliser davantage d’économies dites structurelles, des changements visant à rationaliser et à restructurer les pôles sous le giron de sa direction, s’imposent encore.
La collaboration avec les autres administrations impliquées dans la transformation de l’environnement économique du pays est par ailleurs devenue plus efficace, indique-t-on, avec la mise en place d’une structure de niveau directionnel dont la mission sera la supervision des dettes publiques et le traitement des données statistiques.
Le DGBFI, Jean-Fidèle Otandault se veut d’ailleurs plus précis dans ce sens : « Les réformes ne doivent pas être réalisées dans l’unique but de démanteler l’existant, qui a fait ses preuves, mais dans un processus clair devant déboucher sur une organisation plus adéquate, des économies appréciables et une capacité à mobiliser des ressources supplémentaires».
Il soutient également «qu’une organisation comme la DGBFIP, qui a su démontrer son aptitude à renforcer la capacité de résilience du pays en période de crise, puisse conserver toutes ses marges de manœuvre pour prévenir les risques de dérive dans la gestion de l’argent public, notamment dans un contexte délicat de la vie du pays».
Et de poursuivre ; «La bonne gouvernance financière requiert la mise en place de dispositifs de mobilisation de ressources et de gestion de passifs et actifs financiers, tout en mettant en place des systèmes efficaces de budgétisation, d’exécution du budget, de comptabilité, de rendre compte et d'audit, ainsi que des institutions de surveillance solides».
Le Gabon a déployé de gros efforts ces dernières années pour mettre son système de gouvernance financière au diapason de ce qui se fait dans les pays de référence. Un processus de réformes qui n’a pas été facile à mener dans la mesure où les adversaires du changement n’étaient pas restés les bras croisés. Force est cependant de constater que le pays a pu se métamorphoser dans le domaine de la gestion des ressources publiques.
Du côté de la DGBFI, l’on reste conscient que le processus n’est pas encore arrivé à son terme et que les errements du passé pourront toujours ressurgir si l’on n’y prend pas garde. Raison pour laquelle, tous les acteurs impliqués dans la gouvernance financière publique doivent maintenir cet état d’esprit qui accorde une place prépondérante à la vigilance et à la volonté permanente d’innover pour le bien-être de la population.
La prudence reste de mise
Par ailleurs, avec les facteurs exogènes comme la chute des cours des matières premières ou encore, en interne, les problèmes structurels ne permettant pas de mobiliser de façon optimale les revenus, le pays rencontre encore des difficultés dans la gestion optimale de ses ressources. Faute de moyens pour assumer leurs missions de surveillance, certaines structures de contrôle et d’évaluation sont aussi considérées comme les maillons faibles de la chaîne de responsabilité.
Heureusement explique-t-on, le projet de réorganisation structurelle de la Direction générale du budget et des finances publiques s’inscrit dans cette perspective de poursuivre le changement pour l’égalité des chances, en misant sur les résultats déjà obtenus et en tenant compte du travail d’autodiagnostic réalisé.
En tant que guichet et interlocuteur unique, pour répondre aux préoccupations des usagers du service public qui étaient souvent confrontés à un circuit de dépense trop complexe, lent et source de beaucoup d’incompréhensions, la DGBFIP a pu solutionner de nombreuses faiblesses qui entravaient la bonne performance des services publics.
Pour l’heure, il s’agit de mieux s’armer pour protéger le pays des dérives qui, par le passé, ont entravé la bonne marche de son économie et lésé une frange importante de ses habitants. Ce sera aussi un nouveau défi pour mieux faire face à un contexte politique et socio-économique difficile.
Synclair Owona