Dans un entretien accordé à la presse, Pastor Ngoua N’Neme, le ministre gabonais de l’Economie numérique présente les avancées dans ce secteur en même temps qu’il décline les détails de plusieurs autres projets.

Où en est-on avec la pose de la fibre optique au Gabon ?

Pastor Ngoua N’Neme : Grâce à un financement de la Banque  mondiale, nous allons exécuter le second volet de ce projet dans les tous prochains jours. Ce projet est d’autant plus important et urgent, qu’il impacte les sites concernés par la Can 2017. Si tout se passe comme prévu, selon les dispositions, la pose devrait commencer autour du mois de juin.

Il y a également une troisième phase. Elle consistera au maillage de l’ensemble de toutes les capitales provinciales. Les travaux exécutés actuellement, sont considérés comme une autoroute. Ensuite, il y aura des embranchements pour distribuer la fibre optique dans l’ensemble des capitales provinciales.
Nous sommes activement à la recherche des financements pour ce projet. En dehors des hommes d’affaires égyptiens qui viennent de séjourner au Gabon, nous avons eu d’autres partenaires, bien avant eux qui se sont présentés, à l’exemple de Andorra Telécom qui a fait une offre. Nous avons également choisi la chinoise Star Times qui doit réaliser la TNT.

La Coupe d’Afrique des nations, c’est en janvier prochain. Comment comptez-vous mener cet investissement ? Autrement dit, aurez-vous suffisamment de temps pour boucler ce chantier ?  

Toutes les sociétés consultées n’ont en réalité besoin que de deux à trois mois. Normalement au mois de novembre, tout devrait être fini.

Quel est le coût exact de cette extension ?

Cette extension de la fibre optique s’étend sur près de 600 km, pour un coût de près de 18 milliards Fcfa.

Quel sont avantages que va procurer le nom de domaine. Ga?

C’est d’abord une question de souveraineté. Le Gabon à l’instar des autres pays doit impérativement s’approprier un domaine. Le nôtre c’est le point Ga. Alors avant qu’il n’y ait des retombées, il faut d’abord l’organiser. Il faut que tout le monde au Gabon, ait son point Ga en termes d’adressage. Dans un premier temps, nous allons populariser ce point Ga, de façon à ce que progressivement, tout le monde l’adopte. Nous avons commencé par les administrations et nous allons continuer avec la population et les sociétés pour que le point Ga soit une réalité. Dans ce cas, le point Ga pourra atteindre la masse critique qui va générer des ressources.

En janvier 2017, la télévision gabonaise pourra-t-elle passée à la TNT ?

La TNT ne sera pas possible en 2017. Il n’y a jusque-là que deux ou trois pays qui ont pu réellement commencer le projet de TNT. Raison pour laquelle, l’UIT a reporté le délai qui était initialement fixé à juin 2015. Actuellement, nous avons soumis une nouvelle feuille de route de passage du Gabon au numérique à l’UIT. C’est cette feuille de route que nous essayons d’appliquer. Dans le même cadre, l’Etat a attribué le marché de la TNT à la société chinoise Star Times, qui normalement, va construire l’infrastructure et selon les termes contractuels et va également opérer.

Quelle est la situation de l’économie numérique au Gabon ?

De façon générale l’économie numérique constitue un puissant levier de croissance. Elle a d’ailleurs été identifiée dans le Plan stratégique Gabon émergent (PSGE). L’ambition du Gabon, c’est de la développer. C’est-à-dire favoriser l’alliance entre les télécommunications et l’informatique. Mais il faut avoir une infrastructure qui permet de véhiculer le plus rapidement possible l’ensemble des savoirs, l’ensemble des connaissances, l’ensemble des applications. Il faut disposer d’une infrastructure qui permette à tous les Gabonais de communiquer, se divertir, s’éduquer et de pouvoir faire des affaires. Donc la première chose à faire en matière d’économie numérique consiste en la construction d’une infrastructure.

Et dans cette infrastructure vous avez par exemple la décision du Gabon de participer au câble Ace. Cette participation a permis au Gabon de multiplier sa connectivité internationale par 8. Nous sommes donc passés de 800 giga  à  6400 giga, ce qui est extrêmement important. Ça voudrait dire que nos communications entrantes et sortantes sont, non seulement rapides, mais aussi relativement fluides. La deuxième décision que le gouvernement gabonais a prise c’est la construction d’un réseau national à fibre optique, dont nous avons parlé.

D’un autre côté, vous avez les opérateurs privés, qui accompagnent également le gouvernement dans le développement de cette économie numérique. C’est ainsi que vous avez vu les opérateurs développer leurs offres de service, mais avant ils ont signé des licences 3G ou 4G, pour fournir des prestations encore plus rapides et plus fluides. Nous avons au Gabon les deux principaux opérateurs qui sont passés à la norme 3G et 4G.

En termes d’accès à la téléphonie mobile, le Gabon c’est environ 186% de taux de pénétration, pour l’internet mobile l’on se situe à 76%. Au regard de ces chiffres, en termes de téléphonie mobile, le Gabon se comporte comme s’il était peuplé à peu près de 3 000 000 d’habitants.

Vous voyez que c’est quelque chose de phénoménal. Et en termes de chiffres sur le plan économique, c’est près de 400 milliards de chiffre d’affaire. Dans la richesse nationale, l’économie numérique pèse près de 5%. Telles sont les données actuelles de l’économie numérique au Gabon.

Par André Owona, avec Gabon Economie.

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Pour faire face au ralentissement de la croissance lié à la chute des prix du baril de pétrole et les difficultés récurrentes de trésorerie de l’Etat qui ont fortement assombri les perspectives des entreprises gabonaises, à la demande de la Confédération patronale gabonaise (CPG), le gouvernement et le patronat se sont réunis le mois dernier, afin d’identifier les mesures d’urgence nécessaires pour tenter d’amoindrir les effets sociaux liés à la crise actuelle.

A l’issue de cette rencontre, le « Pacte pour le maintien de la croissance et la préservation des emplois en période de crise pétrolière » a été adopté. Celui-ci consiste, à travers sept mesures, à redynamiser le tissu économique et financier et à valoriser davantage certains secteurs économiques. Des mesures qui témoignent de la volonté des autorités gabonaises d’apporter des réponses aux préoccupations des entreprises, même si, pour certains observateurs, la proximité des prochaines consultations électorales laisse craindre la manque d’efficacité ou alors la non-matérialisation de ce pacte.

Redynamisation du tissu économique et financier

La redynamisation du tissu économique et financier constitue le premier engagement du Pacte. Il consiste à poursuivre le paiement régulier de la dette contractée par l’État auprès des entreprises. Un total de 1296 Mds FCFA aurait été remboursé au cours des années 2014 et 2015, 200 Mds FCFA restant à régler, hors arriérés de TVA selon les chiffres fournis. L’Etat s’engage aussi à régler ces 200 Mds restant dus, à compter de juillet 2016, après compensation avec les dettes fiscales reconnues.

L’Etat s’est également engagé à régler les précomptes sur salaires au titre de l’année courante. S’agissant de la dette de TVA, de loin la plus importante, quatre mesures sont envisagées : établissement de conventions de remboursement d’une durée de 1 à 3 ans ; réduction des délais de traitement des demandes de remboursement de TVA à 30 jours fin de mois et réduction du taux de précompte de TVA sur les marchés publics de 60 à 40%.

Enfin un taux de TVA à 0% sera créé pour les compagnies pétrolières locales : dans les faits, cette décision viendrait unifier un système compliqué dans lequel, ce taux était déjà appliqué selon différentes modalités (exonération, dispense...). Il est prévu que les dettes non encore enregistrées, mais recensées, seront examinées et feront l’objet de conventions de règlement sur trois ou cinq ans. Les sommes perçues dans le cadre de ces moratoires ne pourront être transférées à l’étranger pendant au moins un an après la fin du moratoire.

Améliorer la compétitivité des entreprises, en particulier dans les filières agro-industrielles et l’industrie

Autre engagement pris par le gouvernement. Il consiste à adopter la Stratégie nationale de promotion des investissements avant mai 2016 et à organiser le premier Haut-conseil à l’investissement avant fin juin 2016. Le Pacte conclut également au nécessaire réexamen de l’opportunité des nombreuses taxes  parafiscales qui entravent la compétitivité des entreprises.

Promouvoir les TPE-PME

Le cinquième engagement du Pacte se résume en une série de mesures envisagées, portant notamment sur la création d’un annuaire des TPE-PME et d’un « espace PME » destiné à fournir à celles-ci les informations et l’appui technique dont elles auraient besoin.

En outre, il est prévu d’adopter à horizon juin 2016, une charte des PME et de rendre opérationnels des outils déjà mis en place par la Chambre de commerce (un centre de gestion agréé, un centre d’arbitrage et une bourse de la sous-traitance).

Le septième engagement concerne la vulnérabilité du secteur financier gabonais. Le Pacte prévoit, en lien avec la COBAC (Commission bancaire de l'Afrique centrale), l’adoption d’un plan de restructuration des banques publiques à horizon juin 2016. Celles-ci font déjà l’objet de mesures conservatoires depuis l’année passée, avec dans le « viseur » de l’Etat le secteur de la microfinance, loin d’être assaini.

André Owona

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Le Gabon est l’un des premiers pays africains à adopter une politique d’assurance maladie obligatoire avec la création de la Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale (CNAMGS) en 2007. Le système, bien que salué par bon nombre d’observateurs, doit encore faire face à de nombreux défis. Parmi ces défis, les fausses déclarations des populations et la stagnation des recettes, couplée à l’augmentation continue du nombre d’assurés.

L’une des particularités de l’assurance maladie universelle au Gabon, c’est la disposition d’un fonds destiné à la couverture sanitaire des Gabonais économiquement faibles (GEF). D’après le Pr Michel Mboussou (photo), directeur général de la Caisse nationale d’assurance maladie et de garantie sociale (CNAMSG), au 31 décembre 2015, ce Fonds comprenait 258 629 Gabonais économiquement faibles (GEF) assurés principaux, 27 588 étudiants assurés principaux, 7088 élèves non-ayants droits assurés principaux et 55 religieux assurés principaux, auxquels s’ajoutent les 223 310 ayants-droits de toutes ces catégories sociales. Ce qui fait un effectif total de 516 666 personnes immatriculés au fonds des GEF. Il faut noter que la loi autorise la CNAMGS à assurer la couverture sanitaire des étudiants, élèves et enfants dans le cadre de ce fonds, bien que ces personnes ne soient pas considérées comme des personnes économiquement faibles.

Selon les résultats de la dernière campagne d’immatriculation des GEF, la CNAMGS indique avoir enregistré 183 157 assurés principaux et 53 768 ayants-droit, soit 236 925 personnes. Mais, ces derniers ne seront intégrés dans la base de données de la CNAMGS que lorsque des enquêtes sociales auront été réalisées pour expurger de cette liste les Gabonais ayant des revenus déclarés, indique Pr Michel Mboussou.

Ainsi donc, ils sont nombreux les Gabonais qui, lors de l’enregistrement, se sont fait enrôlé comme Gabonais économiquement faibles afin de bénéficier des avantages de l’assurance maladie alors que ceux-là avaient des revenus déclarés. Il faut noter que la CNAMGS ne rembourse à 100% que les soins de santé des mères. Le coût des autres frais médicaux pris en charge étant remboursé à 80% et à 90% dans le cas des affections chroniques. Le reste des 20% ou 10% étant à la charge du patient assuré.

Les enregistrements frauduleux ont donc fait perdre à l’Etat gabonais des centaines de millions de francs Cfa par mois durant plusieurs années.

Des fausses déclarations

Dans une interview accordée au quotidien L’Union en mars 2016, le directeur général de la CNAMGS expliquait que le système déclaratif d’enrôlement des Gabonais économiquement faibles, sans au préalable une enquête sociale avait encouragé ces irrégularités. Une situation que les « circonstances ont imposé au début des activités de la CNAMGS » d’autant plus que les activités de la CNAMGS ont commencé par la prise en charge des GEF, d’où la volonté des Gabonais non éligibles à ce fonds à s’enregistrer rapidement en oubliant qu’il était également prévu la prise en charge des autres catégories sociales, explique le Pr Michel Mboussou.

Face à cette situation, la CNAMGS a plus tard décidé de procéder à la vérification de la liste des GEF enregistrés. La stratégie a été simple : croiser les fichiers de la CNAMGS avec ceux de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), avec ceux de la Direction de la Solde et avec ceux de l’ex-CDE. Les résultats ont été surprenants : « L’on a constaté 12 642 assurés principaux détectés en doublon et 14 959 enfants rattachés à la CNSS, 129 assurés principaux en doublon et 17 enfants rattachés à la Solde. A l’ex-CDE, 61 assurés principaux en doublon et 52 enfants y étaient rattachés », laisse entendre le Pr Michel Mboussou. S’en suivra le retrait immédiat de ces doublons dans le fichier de la CNAMGS. Ce qui a fait en sorte que la CNAMGS économise au deuxième trimestre 2014 la somme de 643 387 000 FCfa  représentant le paiement de prestations familiales.

Globalement, les résultats de ce croisement des listes ont été probants. « Le partenariat entre la CNAMGS et la direction de la Solde a permis le paiement des prestations familiales des agents de l’Etat sur la base du fichier CNAMGS, qui est biométrique, alors qu’à la direction de la Solde, le système est déclaratif. Cette opération a permis de détecter 90 000 enfants fictifs enregistrés dans le fichier de la Solde, avec des faux actes de naissance. Par ce système, la CNAMGS fait réaliser à l’Etat, depuis février 2015, des économies de l’ordre de 700 millions de FCfa par mois », révèle le Pr Michel Mboussou.

Pour limiter ces enregistrements frauduleux, le DG de la CNAMGS annonce la création « dans les prochains mois » d’un quatrième fonds destiné aux travailleurs indépendants et aux petits opérateurs économiques du secteur informel. Ceci accompagné d’une large sensibilisation des populations sur les risques qu’encourent les personnes qui font des fausses déclarations. Pour le quatrième fonds de la CNAMGS, en mars dernier, le ministre du Budget et des Comptes publics, Christian Magnagna, a d’ailleurs indiqué aux personnels de la main d’œuvre non permanente que, conformément aux dispositions des articles 1 et 3 du décret du 2 mars 2015 relatif aux taux de cotisation et au plafonnement des salaires soumis à cotisation des affiliés des secteurs public, parapublic et privé au régime obligatoire d’assurance maladie et de garantie sociale, les prélèvements des cotisations Cnamgs sur leur salaire au taux de 1% étaient désormais effectifs.

Jusqu’ici la CNAMGS est composée de trois fonds : le fonds d’assurance maladie des agents publics de l’État ; le fonds des travailleurs salariés du secteur privé, parapublic, des travailleurs indépendants, des professions artisanales, commerciales et libérales et enfin le fonds de garantie sociale des Gabonais économiquement faibles, des étudiants, des élèves et des réfugiés.

Menace sur le fonds des GEF

Le fonds des GEF est financé par la redevance obligatoire à l’assurance maladie, assise sur le chiffre d’affaires des sociétés de téléphonie mobile, soit 10% et les transferts des fonds à l’étranger, hors zone CEMAC, soit 1,5% du montant à transférer.

D’après la CNAMGS, les recettes du Fonds des GEF stagnent alors que l’on observe une tendance haussière des dépenses. Situation causée d’après la CNAMGS aux difficultés de règlement de certains opérateurs mobiles, à la forte progression des dépenses de santé suscitée par l’engouement des populations, soit en moyenne 3,5 milliards de F.Cfa par an, et surtout aux arriérés de la redevance non reversés. Arriérés qui s’élèvent à 19 milliards de F.Cfa pour le compte des années 2010 à 2014.

« Concernant les prestations de santé, il convient de signaler que l’équilibre financier du Fonds des GEF, déjà fragile au cours des deux dernières années, est rompu en 2015. En effet, sur les 15 milliards de Francs Cfa de recettes encaissées, les dépenses de santé ont été de 16,2 milliards de F.Cfa, dont 14,9 milliards de FCfa pour les dépenses techniques locales et 1,3 milliard de francs Cfa pour les évacuations sanitaires à l’étranger. Soit, un résultat négatif de – 0,7 milliards de FCfa », explique le DG de la CNAMGS au quotidien l’Union.

En clair, en perspectives, avec l’augmentation du nombre des assurés et leurs ayants-droit, avec l’accumulation et les difficultés d’apurement d’arriérés, il est fort probable que le fonds des GEF n’assume plus convenablement ses missions. Pour limiter les dégâts, la CNAMGS compte sur la promesse et l’engagement du gouvernement et du patronat gabonais d’étendre à tous de la Redevance obligatoire d’assurance maladie.

L’assurance universelle, une ambition d’Omar Bongo

D’après les données de l’OMS et de la CNAMGS, la politique de gratuité des soins des populations au Gabon commence en 1991 avec la loi n° 3/91 du 26 mars 1991 qui garantissait la gratuité des soins aux fonctionnaires dans les structures publiques. Les employés du secteur privé, eux, bénéficiaient d’une couverture maladie financée uniquement par les cotisations patronales de 4,1 %. Les agents contractuels de l’État, les travailleurs indépendants et les indigents étaient couverts par la Caisse Nationale de Garantie Sociale (CNGS) par l’entremise d’une subvention de l’État. 

En 2002, le risque maladie est identifié parmi les sujets les plus préoccupants des Gabonais. Deux ans plus tard, des experts internationaux, à la demande du défunt président, Omar BONGO ONDIMBA, réalisent une étude de faisabilité d’une assurance maladie obligatoire et universelle au Gabon. Des experts nationaux et internationaux se réunissent pour trouver les meilleures solutions au problème et deux propositions sont faites. Le président Omar Bongo qui doit choisir parmi les propositions opte pour la création de la Caisse Nationale d’Assurance Maladie et de Garantie Sociale du Gabon (CNAMGS). Une entité dédiée essentiellement à l’assurance maladie et la garantie sociale, autrefois activités de la branche maladie et évacuations sanitaires de la CNSS.

L’ordonnance n° 002/PR/2007 du 04 janvier 2007 instituant un Régime obligatoire d’assurance maladie et de garantie sociale en République gabonaise créée donc également la CNAMGS. Et c’est le 19 décembre 2008 que le président Omar Bongo remet officiellement les premières cartes d’assurance maladie CNAMGS aux Gabonais économiquement faibles concrétisant ainsi son vœu de voir les moins nantis accéder plus aisément aux soins de santé.

Baisse des taux de cotisation

Une autre réforme interviendra en 2008. Le gouvernement qui subventionnait la couverture des indigents met en place un fonds de garantie sociale pour les "Gabonais économiquement faibles" (GEF). En 2011, poursuivant l’œuvre d’Omar Bongo, Ali Bongo œuvre pour que ce ROAM soit étendu aux travailleurs du secteur public et, en 2013, aux travailleurs du secteur privé, autrefois affiliés à la Caisse nationale de sécurité sociale. Sous l’ère Ali Bongo, on va noter la revalorisation du montant des allocations familiales des Gabonais économiquement faibles de 1000 FCFA par enfant et par mois à 4000 FCFA. En août 2014, ce montant passera à 5000 FCFA.

Il faut aussi relever que, lors du conseil des ministres du 29 janvier 2015, Ali Bongo, avait décidé de revoir à la baisse les taux de cotisation pour les personnels assujettis au Régime obligatoire d’Assurance maladie et de garantie sociale. Ce sont les affiliés des secteurs public, parapublic et privé. Ces taux sont à présent de 4,10 % à la charge de l’employeur (sans changement), de 1 % à la charge du travailleur (contre 2,5 % auparavant) et 0,5 % à la charge du retraité (contre 1,5 % auparavant). Par ailleurs, précise le communiqué du conseil des ministres, la part du salaire mensuel soumise à cotisation est désormais plafonnée à 2,5 millions de FCfa.

Pour la CNAMGS dont le slogan est « la solidarité a un sens », c’est grâce aux qualités de visionnaire du défunt président Omar BONGO ONDIMBA que le Gabon est « le premier pays en Afrique subsaharienne à disposer d’un régime obligatoire d’assurance maladie universelle ».

« Cet héritage fait aujourd’hui la fierté de tous les Gabonais et suscite l’admiration d’autres pays africains qui veulent s’inspirer de l’expérience gabonaise en matière d’assurance maladie », se réjouit la CNAMGS.

Beaugas-Orain Djoyum

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La Direction générale de l’Insertion et de la Réinsertion sociale (DGIRS) du ministère du Travail, de l’Emploi et de la Formation professionnelle du Gabon a mis en place avec des partenaires locaux le programme « Un jeune = Un métier » qui vise à former les jeunes désœuvrés de 16 à 35 ans à 52 métiers au choix. Du 22 février au 14 mars 2016, une caravane d’inscription sillonne les six arrondissements de Libreville pour les inscriptions. A la Mairie de Nzeng Ayong (sixième arrondissement de Libreville), dernière étape où la caravane se trouve depuis le 08 mars 2016, l’affluence est plus prononcée. Responsable du comité d’organisation de la caravane d’inscription de ce programme « Un jeune = Un métier », Arielle-Aurore Ambengat explique les contours du projet ainsi que les modalités pour cette campagne de formation des jeunes désœuvrés qui recevront 50 000 francs Cfa tous les mois durant la période de la formation.

Le Nouveau Gabon : Comment se passe le processus d’inscription des jeunes gabonais au programme Un jeune, un métier ?

Arielle-Aurore Ambengat : Les caravanes d’inscription ont commencé depuis le 22 février 2016. Nous avons commencé par les premiers arrondissements de Libreville. Owendo et Akanda. Nous sommes en ce moment au sixième arrondissement. Nous y sommes du08 au 14 mars. Ce que nous constatons sur le terrain, c’est qu’il y a un fort engouement des jeunes. C’était un programme prévu pour recevoir 2 500 jeunes. Nous nous sommes rendus compte qu’il y a beaucoup de jeunes dans des situations de déscolarisés. Il y a également les enfants de la rue dans la rue. Nous enregistrons tout le monde. Et nous verrons dans quelle mesure faire plusieurs sessions de formation. Initialement, la formation était prévue pour 2 500 jeunes seulement.

LNG : Comment se déroulent les formations ?

AAA : Ce sont des formations courtes et qualifiantes de trois mois. Nous formons des aides mécaniciens, des aide-cuisiniers. Si ces jeunes par la suite veulent devenir des véritables mécaniciens par exemple, ils pourront intégrer nos écoles sans besoin de passer par un concours.

LNG : Certains jeunes, dit-on, auront la possibilité de recevoir 50 000 francs Cfa au terme de la formation. Comment ces montants seront-ils distribués ?

AAA : Tous les jeunes que nous allons sélectionner pour les formations que nous allons dispenser, pour les jeunes qui suivront la formation, auront tous les mois 50 000 francs Cfa qui va leur permettre de venir au centre pour apprendre le métier. Il ne faut pas qu’ils posent plus tard le problème de manque d’argent de taxi pour se rendre au centre de formation. C’est uniquement pour la période de la formation, soit pendant trois mois.

LNG : Où se tiendront ces formations ?

AAA : La formation va se dérouler dans nos centres de formation et de perfectionnement professionnel (CFPP). C’est-à-dire à Basile Ondimba, au centre de Nkembo, au CIADFO, à l’Institut de la jeunesse et des sports, à l’Enam. Nous travaillons également avec deux Ong qui feront également des formations. Il s’agit de l’ONG CIADFOR et l’ONG Malachie.

LNG : Qui seront les formateurs ?

AAA : Ce sont nos formateurs qui sont déjà en fonction. Ce sont d’ailleurs ces formateurs qui enregistrent les candidats ici dans les centres d’enregistrement et orientent les jeunes dans les filières qu’ils choisissent.

LNG : Quel était l’objectif du programme « Un jeune, un métier » au départ ?

AAA : Au départ, nous avions prévu d’enregistrer 2 500 jeunes. C’est-à-dire 2 500 jeunes en chômage, qui ne font rien, qui n’ont aucune occupation et aucune qualification. Nous voulions donner à ces personnes un métier. Mais avec 2 500 jeunes, nous nous sommes rendus compte très vite que le nombre était réduit. Nous avons dépassé ce nombre et percé les plafonds. Nous avons déjà dépassé 6 000 enregistrements. Nous sommes encore là jusqu’à la journée du 14 mars pour les enregistrements. Nous ne nous attendions pas à avoir autant de jeunes. Nous ne pouvons pas arrêter. Nous allons poursuivre et voir par la suite comment organiser les formations. Au lieu d’une session de formation d’avril à juin 2016, peut-être nous allons prendre une cohorte de 2 500 jeunes pour une autre session de formation. Et ainsi de suite jusqu’à ce qu’on termine ces formations.

LNG : Parmi ces 6 000 candidatures déjà enregistrées, tous les dossiers ne seront pas retenus, j’imagine…

AAA : Evidemment, il y a des jeunes dont les dossiers seront rejetés. Par exemple, les élèves qui sont dans les lycées en situation d’apprentissage ne sont pas concernés. Certains lycéens se sont inscrits. Il en est de même pour les étudiants qui sont à l’Université d’Omar Bongo et qui se sont inscrits. Nous allons sélectionner uniquement ceux qui ne font rien.

LNG : Si un jeune a déjà une compétence, peut-il venir s’inscrire dans ce programme pour renforcer son savoir-faire ?

AAA : Pour avoir une attestation, oui, il peut venir s’inscrire. Car à la fin de la formation, nous délivrons des attestations sur les métiers que nous avons enseignés. Ceux qui travaillent déjà sans certification peuvent également s’inscrire. Car il faut penser à demain. Les choses changent. C’est bien beau de faire un business, mais un business sans papiers n’a pas trop de valeur. Un pâtissier par exemple qui n’a pas de certification peut venir et en trois mois, il obtient sa certification, en faisant sa formation directement en entreprise. Si un jour, une grande boulangerie s’installe dans le pays, avec sa certification, il aura plus de chance d’être recruté que ceux-là qui n’ont pas de certification.

LNG : Certains jeunes sans emploi également n’ont pas d’acte de naissance. Des dispositions, dit-on, ont été prises pour que ces jeunes désœuvrés ne soient pas disqualifiés parce qu’ils n’ont pas d’acte de naissance. Quelles sont ces dispositions ?

AAA : La caravane d’inscription a prévu tout cela. Avec la participation du ministère de la Justice et des Mairies de Libreville, nous enregistrons tous les jeunes qui sont sans acte de naissance. Et s’ils sont inscrits à nos formations, au terme de la formation il leur est délivré un acte de naissance. Surtout pour ceux qui sont nés à Libreville, parce que ce sera plus facile. Pour ceux qui sont nés à l’intérieur du pays, ce serait un peu compliqué, parce qu’il faut toujours repartir dans les mairies où ils sont nés pour faire les actes de naissance. L’objectif est de donner une existence à chaque jeune qui sera formé.

LNG : On vient de célébrer la journée internationale de la femme. Y a –t-il des jeunes dames qui s’enregistrent pour participer à ce programme ‘’Un jeune, un métier’’ ?

AAA : Ah Oui ! Les femmes sont d’ailleurs plus nombreuses que les hommes.

LNG : Par jour combien de jeunes enregistrez-vous ?

AAA : Cela dépend des arrondissements. Nous sommes passés dans l’arrondissement d’AKANDA. On y avait 200 et 300 personnes par jour. Ceux qui sont allés faire des enregistrements dans le cinquième arrondissement avaient 1 000 enregistrements par jour. Ici à la Mairie de Nzeng Ayong, avec l’engouement observé, la moyenne pourra être de 2 000 enregistrements par jour.

LNG : Le programme ‘’Un jeune, un métier’’ se passe uniquement à Libreville. Qu’en sera-t-il des autres villes comme Port-Gentil et les nombreuses autres localités du pays ?

AAA : C’est un projet pilote. Nous commençons à peine. Nous avons monté ce projet à la Direction de l’Insertion du ministère de la Formation professionnelle. Nous avons eu la chance que le projet retienne l’attention des autorités et nous avons été sponsorisé. Nous commençons ce projet pilote et si tout se passe bien, nous allons le poursuivre dans les autres localités du pays.

LNG : Certains jeunes désœuvrés hésitent encore à se présenter dans les caravanes d’inscription. Quel message adressez-vous aux réticents ?

AAA : En tant que professionnelle et technicienne, je leur dis essayez. Ce n’est pas parfait, mais nous ferons le maximum pour les satisfaire et pour leur permettre de trouver un métier. Le plus important pour nous c’est d’avoir une bonne partie de jeunes gabonais formés. Si on y arrive, ce sera déjà une grande satisfaction.

Propos recueillis par Beaugas-Orain Djoyum

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Les entreprises gabonaises ont récemment exposé au président gabonais, Ali Bongo, leurs exigences pour mieux impulser la croissance au Gabon en 2016. C’était le 05 janvier 2016 lors de la traditionnelle cérémonie de présentation des vœux au président de la République. Et pour porter la voix des chefs d’entreprises du Gabon, Jean-Bernard Boumah, le directeur général exécutif du groupe Ceca-Gadis (magasins de distribution CKDO/GABOPRIX, SuperCKDO, Géant CKDO et MaxiCKDO), qui a été confirmé le 11 février 2016 à la tête de la Confédération patronale gabonaise (CPG) en remplacement de Madeleine Berre, promue au poste de ministre du Commerce, des Petites et moyennes entreprises, de l'Artisanat, du Tourisme et du Développement des services dans le gouvernement du 11 septembre 2015.

En présentant les vœux du patronat gabonais à Ali Bongo, Jean-Bernard Boumah a donc profité pour présenter les attentes et exigences des chefs d’entreprises à Ali Bongo et au gouvernement gabonais. En 2016, pour que les entreprises s’approprient les trois questions fondamentales exigées par le président à savoir la croissance, la compétitivité et l’emploi, il y a des préalables que le gouvernement devrait respecter. Surtout que 2015 a été une année particulièrement difficile pour les entreprises gabonaises, d’après lui. Ceci du fait de la chute du cours du baril du pétrole à l’international. Encore que cette année 2016, relève-t-il, les prévisions, comme ailleurs dans le monde, font naître quelques préoccupations. D’où l’interpellation d’Ali Bongo : « Excellence Monsieur le président de la République, face à cette crise, jamais notre pays aura autant besoin de ses entrepreneurs, car ce sont eux qui pourront faire gagner le Gabon en l’aidant à s’adapter et à se réformer. Surtout que ces réformes que vous portez depuis votre accession à la magistrature suprême ont pour objectif final la croissance, la compétitivité et l’emploi. »

 

Solder la dette intérieure et le rembourser la TVA

Les entreprises gabonaises se sont approprié ces trois questions et ont un devoir de réussite, indique Jean-Bernard Boumah. « Mais, il nous faudra pour cela agir vite et ensemble », propose-t-il. « Agir vite et ensemble pour un règlement rapide de la dette intérieure d’une part et le remboursement des crédits de TVA d’autre part qui sont nos préoccupations majeures. Le remboursement à hauteur de 40% ou plus d’encours de la dette par exemple et le recours à la formule du Club de Libreville, qui bien que faisant appel à la patience, a fait ses preuves. » Le mot est donc lâché : dette. Et c’est le point principal de divergences entre le secteur privé gabonais et les pouvoirs publics, accusés de non-paiement de cette dette publique intérieure de l’Etat estimée à 29 milliards de Francs Cfa par le ministère du Budget en 2015.

Il faut donc, martèle le patron de la CPG au président gabonais, « agir vite et ensemble pour épargner nos entreprises des coûts et frais qui alourdissent leurs charges, et par voie de conséquence parviennent de manière détournée ou automatique à porter un coup au panier de la ménagère et à la compétitivité de nos entreprises. Agir vite et ensemble afin de rassembler toutes les entreprises du Gabon et les impliquer fortement dans le développement du tissu économique de notre pays. Mais aussi, inciter la puissance publique à garantir par tous les moyens à l’égalité des traitements entre tous les acteurs économiques quelque soient leurs dimensions. »

Ces mots ont sans doute résonné. Car, récemment, le 17 février dernier, le Premier ministre, Daniel Ona Ondo, a rencontré les opérateurs marocains installés au Gabon pour les rassurer de ce que cette dette publique intérieure sera bel et bien apurée. Daniel Ona Ondo a indiqué que son gouvernement est conscient que les retards dans le respect de ses engagements financiers pourraient freiner le développement de leurs activités et mettre en péril des emplois. Il leur a promis que les efforts d’apurement de la dette intérieure entamés par le gouvernement depuis 2014 vont se poursuivre.

Pour montrer la gravité de la situation, Ait Ben Ali Mohamed, le DG de Satram a exposé au PM l’expérience de son entreprise. Pour lui, la crise est sévère à Port-Gentil, car il travaille avec des compagnies pétrolières qui subissent, de plein fouet, les effets de chute des cours du pétrole à l’international. Ce qui a une répercussion sur son chiffre d’affaires qui a baissé de 45%. Plus encore, 700 de ses 2 800 employés devraient être licenciés, faute d’activité. Mais, Satram supporte encore les coûts malgré les recettes qui baissent.

Christian Magnagna, le ministre du Budget qui accompagnait le Premier ministre à cette rencontre a aussi tenu à rassurer ces opérateurs économiques. Pour lui, en 2015, l’Etat a réglé sa dette à hauteur de 124 milliards de francs et pour l’année 2016, 157 milliards de francs seront payés. Chiffres du ministre rapportés par Gabon Review.

 

Un Comité pour les procédures de règlement de la dette

Pour montrer sa volonté à solder cette question de dette intérieure, le gouvernement gabonais avait mis en place en novembre 2015 un Comité interministériel d’audit et de certification de la dette intérieure de l’Etat, en abrégé le CIADCIE.  Sa mission, restaurer la crédibilité de l’Etat vis-à-vis de ses partenaires et permettre aux entreprises de retrouver leur santé financière et lutter contre le chômage. Son président, Fabrice Andjoua Bongo Ondimba, avait multiplié des rencontres avec les entreprises et les PME gabonaises pour discuter avec elles des modalités de paiement de cette dette.

En décembre 2015 par exemple, au cours d’une rencontre avec les PME, le CIADCIE avait présenté le chronogramme des paiements et expliqué que pour que l’Etat ne paye plus les entreprises fictives, les paiements de cette dette seront effectués après vérification des travaux réalisés par les entreprises adjudicataires. Pour ces vérifications, le CIADCIE avait indiqué que six mois seraient nécessaires pour recenser toutes les entreprises et PME avant d’entamer les paiements.

Dans le détail, la première étape du travail du CIADCIE consistera à la création d’un guichet unique pour le recensement des entreprises et PME. La deuxième étape consistera à la vérification du travail accompli par ces sociétés avant la dernière étape qui consistera à établir le listing définitif des entreprises concernées. Ceci avant les paiements.

Au cours de cette rencontre, les PME ont dit au CIADCIE leur volonté d’être traitées au même titre que les grandes entreprises du pays, plus favorisées dans le paiement de cette dette. Un mois plus tôt, le ministre du Budget et des Comptes publics, Christian Magnagna, avait indiqué que l’Etat gabonais avait déjà dégagé un montant de près de 10 milliards de FCFA au profit de 480 PME et PMI et que la vérification du travail effectué sera faite avant tout paiement.

Le montant global de la dette intérieure du pays s’élève aujourd’hui à 400 milliards de francs Cfa, selon la Direction générale de la Dette (DGD). Pour l’année 2015, et à fin décembre 2015, la dette intérieure du Gabon était projetée à 150,885 milliards F.CFA. Jusqu’au 30 septembre 2015, le service de la dette publique directe s’élevait à 356,663 milliards de FCFA et comprenait 255,752 milliards de FCFA de dette extérieure et 100,911 milliards de FCFA de dette intérieure. La DGD indiquait alors que le service de la dette intérieure comprenait 82,295 milliards de FCFA de capital et 18,616 milliards de FCFA d’intérêts. Les règlements intérieurs se sont élevés à la même période à 63,123 milliards de FCFA de remboursements et 11,337 milliards de FCFA d’intérêts

 

Dette intérieure du Gabon au 30 septembre 2015

 

Type de dette

Montant

Règlements

Dettes bancaires 

44,910 milliards de F.CFA

44,910 milliards de F.CFA

Dettes diverses 

21,247 milliards de F.CFA

21,413 milliards de F.CFA*

Dettes moratoires

32,226 milliards de F.CFA 

32,512 milliards de F.CFA*

Dettes envers le marché financier régional

2,528 milliards de F.CFA

2,528 milliards de F.CFA*

Source : données compilées avec les chiffres de la DGD. dette.ga

*Il faut noter que la DGD précise que le montant total des règlements intègre le paiement des échéances antérieures à 2015 pour 1,848 milliard de FCFA et des paiements par anticipation des titres des Eurobonds émis en 2007 et 2013 pour un montant global de 23,256 milliards de FCFA.

 

Miser sur l’entreprise

En plus du règlement de la dette intérieure, le patronat gabonais a présenté au président de la République le 05 janvier dernier, d’autres pistes pour que pour que les entreprises gabonaises participent pleinement à la croissance du pays. Parmi ces pistes, le développement du partenariat public-privé. Car cela permettra d’avoir au Gabon « un dispositif approprié et bénéfique pour les deux parties prenantes », pense le patron de la CPG.

Certains textes réglementaires en matière de formation sont attendus par les entreprises. Il s’agit, relève Jean-Bernard Boumah, « des textes importants sur l’apprentissage et la formation professionnelle vivement attendus pour organiser et réguler efficacement ces domaines. Tous ces dispositifs sont essentiels pour assurer l’employabilité des jeunes et lutter efficacement contre le chômage de cette tranche de la population ».

 

in- 

Aussi, Jean-Bernard Boumah (photo), a invité Ali Bongo à un forum avec le secteur privé afin de mieux s’imprégner de leurs problèmes et tracer les chemins de la croissance : « Monsieur le président de la République, vous avez fait le pari de l’entreprise. Vous faites confiance aux entreprises et aux entrepreneurs. Vous ne manquez pas de manifester votre soutien et vos encouragements. Vous avez raison. Aussi, voudrais-je profiter de cette circonstance solennelle pour vous transmettre l’invitation de ces entrepreneurs à une nouvelle rencontre afin d’échanger sur les enjeux de développement de notre pays ». Ceci afin que les entreprises soient plus confiantes de l’attention du pouvoir en place.

Pour Jean-Bernard Boumah, quel que soit leur secteur d’activité, quelle que soit leur localité et quelle que soit leur taille, toutes les entreprises du Gabon ont un rôle à jouer pour la croissance du pays. « Cellule humaine la plus importante après la famille, l’entreprise est un lieu de développement personnel, d’intégration sociale, de dignité humaine par le travail individuel et collectif. Mais, l’entreprise est aussi, je le crois profondément ce qui permettra de résoudre la très grande majorité des défis auxquels notre pays est confronté. L’entreprise porte en effet en elle l’esprit d’initiative, de créativité, d’adaptation permanente, de travail d’équipe et la volonté de bâtir un monde meilleur. Encore faut-il, Monsieur le président de la République l’accompagner dans sa croissance, tant sur le plan économique et social que du point de vue de la sécurité juridique », a rappelé le président de la CPG.

En réponse à toutes ces doléances, Ali Bongo a invité le gouvernement à travailler de commun accord avec tous les acteurs économiques et sociaux pour que « l’économie de rente laisse la place à l’économie de production, à la justice et au mérite, seule manière de développer durablement le Gabon au profit du plus grand nombre ».  Les entreprises et PME attendent donc, en espérant avoir été entendues.

Beaugas-Orain Djoyum

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Les Chinois sont maîtres d’œuvre de nombreux projets d’infrastructures au Gabon. Ils ne se limitent plus à être à la manœuvre des chantiers les plus importants du pays comme ceux de la Can 2017 ; ils s’invitent dans le programme Graine qui vise le développement de l’agriculture ; ils gardent un œil sur le secteur minier et ont désormais la possibilité d’entrer au Gabon sans visa. Comment le pays de Xi Jinping (photo) tisse sa toile lentement, mais sûrement dans ce pays de l’Afrique centrale.

Le stade de l’Amitié sino-gabonaise encore appelé stade d’Agondjé à Libreville est sans doute l’une des réalisations chinoises les plus visibles du Gabon et qui donne fière allure à la capitale gabonaise. Comme un grain de beauté, ce joyau architectural accueille, non pas seulement les rencontres sportives, mais aussi les événements nationaux et internationaux de grande envergure comme le New York Forum Africa et bien d’autres. Un stade de 40 000 places construit par l’entreprise chinoise Shanghai Construction Group pour un montant de 30 milliards de francs CFA (environ 46 millions d'euros). Construit en vue de la CAN 2012 (il a accueilli la finale), il a été inauguré le 10 novembre 2011 avec le match Gabon - Brésil (0-2).

Si ce stade a été baptisé stade de l’Amitié sino-gabonaise, c’était aussi pour magnifier le type de relations qu’entretiennent les deux pays depuis plus de 40 ans, car c’est en 2014 que le Gabon et la Chine ont célébré le 40e anniversaire de l’établissement de leurs relations diplomatiques. Omar Bongo, le père de l’actuel président Ali Bongo, avait visité la Chine au moins dix fois en trois décennies. Octobre 1974, juin 1975, mai 1977, décembre 1978, Octobre 1983, février 1987, mai 1991, août 1996, septembre 2004 et novembre 2006. Quelques mois après son élection, Ali Bongo a été invité en Chine en avril 2010 pour l’exposition universelle de Shanghai. Récemment, le président gabonais s’est même amusé à créer un compte sur Sina Weibo, ce réseau social chinois qui compte plus de 400 millions d’utilisateurs en Chine. Pour la Présidence gabonaise, ce compte permettra « notamment de relayer les prises de parole du Chef de l’Etat, les événements clés de la vie économique gabonaise ainsi que les rencontres et les réalisations menées dans le cadre de la coopération sino-gabonaise ».

Plus de visa

Aujourd’hui, les fonctionnaires et les diplomates gabonais n’ont plus besoin de visas pour se rendre en Chine. Idem pour les fonctionnaires chinois qui se rendent au Gabon. La seule condition exigée étant la présentation d’un passeport diplomatique ou d’un passeport de service. Un accord à durée illimité portant suppression des visas pour les titulaires de ces passeports a été signé dans ce sens le 15 décembre 2015 à Libreville par le ministre gabonais des Affaires étrangères, Emmanuel Issoze Ngondet et l’ambassadeur de Chine au Gabon, Sun Jiwen. Les détenteurs de ces passeports ne devront pas, par contre, y effectuer un séjour de plus de trente jours. Et les observateurs y voient déjà un moyen intelligent de multiplier les échanges entre les deux pays.

Le Gabon est ainsi le premier pays de l’Afrique centrale à avoir ce type d’accord avec la Chine. Dans le monde, ce type d’accord a déjà été signé avec le Bénin, le Brésil, la Corée du Sud, Djibouti, la France, la Guinée Conakry, le Sénégal, le Burkina Faso, la Côte d’ivoire, Cuba, l’Egypte, l’Israël, le Mali et la Russie. Ce genre d’entente s’étant également aux détenteurs des passeports ordinaires de trois pays africains à savoir l’Afrique du Sud, le Maroc et l’île Maurice.

Infrastructures

Cette ouverture entre sans doute dans la stratégie de la Chine pour avoir le maximum d’opportunités au Gabon. Elles sont nombreuses les entreprises chinoises qui gagnent des marchés dans le secteur des BTP au Gabon. Le futur stade de football de la ville d’Oyem (nord du Gabon), situé à 17 km de la ville, qui occupera une superficie de 27 000 m2 pour une capacité de 20 500 places et qui servira pour la Coupe d’Afrique des nations de football en 2017, est en construction en ce moment par la même société chinoise Shanghai Construction Group. A Port-Gentil, capitale économique, un stade d’une capacité de 20 000 places est également en chantier et placé aux mains de la société chinoise China State Construction Engineering Corp (CSCEC). A partir de juin 2016, trois centres de formation professionnelle de 20 hectares chacun seront construits au Gabon (à Libreville, à Franceville [Sud-est] et à Port-Gentil) par la société chinoise Avic International Gabon. La banque chinoise Eximbank a déjà accordé au Gabon un prêt de 60 milliards de FCFA à cet effet. Il y en a ainsi plusieurs exemples.

En général, note la Présidence de la République du Gabon, aujourd’hui, près d’une trentaine d’entreprises chinoises opèrent au Gabon dans des secteurs comme la santé, les BTP, les mines ou encore l’exploitation forestière, et la Chine est le premier client du Gabon, puisqu’elle reçoit 14% de ses exportations.

400 millions de dollars US d’échanges commerciaux

Lors de la Commission mixte Chine – Gabon qui s’est tenue le 28 janvier 2016 à Libreville au Gabon, le vice-ministre chinois au Commerce, Qiang Keming, a spécialement effectué le déplacement de Libreville pour l’occasion. Au terme de cette rencontre « la partie chinoise a approuvé 11 projets ayant bénéficié des prêts concessionnels ou des crédits d’acheteurs préférentiels, dont le montant total s’est élevé à plus de 8 milliards 800 millions de Yuans. Il a ensuite été procédé à la signature de deux accords de prêts en vue de la construction de deux stades à Port Gentil et Oyem, ainsi que de la route Forasol-Mbega à Port-Gentil », rapporte le quotidien gouvernemental l’Union dans son édition du 29 janvier. De même, l’on apprend lors de cette commission mixte que de 2006 à 2014, que le volume des échanges commerciaux entre la Chine et le Gabon est passé de 400 millions de dollars US à 2,04 milliards de dollars US.

De quoi réjouir les autorités publiques. Lors du récent forum Chine-Afrique organisé à Johannesburg en Afrique du Sud, Ali Bongo a salué cette coopération entre son pays et la Chine. « En effet, la Chine, à travers ses investissements, participe à la réalisation d’importants projets structurants pour le développement du Gabon. Cela en fait un partenaire privilégié dans la matérialisation du programme de développement, que je mets en œuvre depuis mon accession à la magistrature suprême. C’est pour moi l’occasion d’exprimer mon entière satisfaction quant au rôle joué par notre plateforme commune (commission mixte Chine-Gabon, ndlr) qui, au fil des années, s’est inscrite comme le catalyseur de réalisations concrètes qui font du partenariat sino-africain, un modèle de coopération Sud-Sud s’appuyant sur un mécanisme efficace de suivi, le FCSA devenu l’emblème de la solidarité sino-africaine », a déclaré le président gabonais.

De manière générale, Pékin ambitionne de porter les échanges commerciaux Chine-Afrique à 400 milliards de dollars à l’horizon 2020 et il y a fort à parier que le secteur des ressources naturelles occupera une place de choix. Déjà, le président Xi Jinping, au terme du récent forum Chine-Afrique, a promis 60 milliards de dollars pour les investissements en Afrique dans trois ans, dont cinq milliards à 0% d’intérêt. Et ce, qu’importe la situation actuelle de la Chine.

A la chasse des mines et de l’énergie

En effet, la Chine, dans son ambitieux élan, a besoin des ressources naturelles de l’Afrique pour construire et maintenir son leadership dans le monde. L’Afrique, riche en matières premières, est donc pour elle un bon risque. Dans leur livre blanc baptisé « La politique de la Chine à l'égard de l'Afrique » et publié le 04 décembre 2015, les autorités de Pékin s’engagent d’ailleurs au point 06 d’approfondir la coopération Chine-Afrique en matière de ressources naturelles et d'énergie. Et ce : « conformément aux principes de la coopération gagnant-gagnant et du développement vert, bas carbone et durable ». Ils s’engagement également à « élargir et approfondir la coopération mutuellement bénéfique entre la Chine et l'Afrique dans les domaines des ressources naturelles et de l'énergie, aider les pays africains à renforcer les capacités de prospection, d'exploration et de transformation des ressources naturelles et des énergies, augmenter la valeur ajoutée des produits primaires, accroître l'emploi et les revenus en devises étrangères sur place, et transformer la dotation en ressources naturelles et en énergie en fruits du développement durable qui bénéficient à la population. Innover les modes de coopération en matière de ressources naturelles et d'énergies, étendre la coopération sur l'ensemble de la chaîne industrielle dans le domaine de l'énergie et des mines ». La trajectoire est donc définie.

Stabilité dans la crise et un œil sur le secteur minier

Face à la conjoncture économique de la Chine, qui se traduit également par une baisse des importations des matières premières africaines et la chute du yuan, l’ambassadeur de la Chine au Gabon, S.E. Sun Jiwen, avait invité les opérateurs économiques et les officiels gabonais en septembre 2015 pour les rassurer que malgré la situation de son pays, la Chine va maintenir la stabilité de ses relations avec le Gabon. Pas question donc de ralentir les réalisations et ambitions de la Chine au Gabon. « Bien au contraire, elles continueront sur la voie de la stabilité », a-t-il rassuré.

Le secteur minier gabonais contribue à 5% du PIB gabonais d’après le dernier rapport du Comité ITIE qui date de 2010. Le pays regorge d’importantes ressources minières : manganèse, fer, or, diamant, argent, plomb zinc, ou encore barytine, dont la majeure partie n’est pas encore exploitée. Le Comité ITIE affirme dans son rapport 2010 que le Gabon est d’ailleurs le deuxième producteur mondial de manganèse exploité (95% destinés aux industries sidérurgiques) dans l’Est du pays à Moanda par la Compagnie minière de l’Ogooué (Comilog). La production pour l’année 2010 a atteint 3,2 millions de tonnes contre 0,6 millions de tonne en 2009.

De nombreux experts s’accordent à dire que cette production est vendue aux Chinois et soutiennent que les Français de Comilog disposent d’ailleurs de deux usines de transformation dans la province de Guangzhou en Chine.

Le manganèse qui a glissé entre les mains

Si depuis 1953, Comilog exploite le manganèse à l’état brut, la situation va progressivement changer. Car en juin 2015, le Complexe métallurgique de Moanda (CMM), a été inauguré pour la transformation du minerai de manganèse. Cette mine visait une production de 3,8 millions de tonnes à la fin de l’année 2015. L’Etat gabonais est actionnaire du CMM à hauteur de 40%. Le groupe français Eramet un investi 230 millions d’euros à l’occasion.

Autre futur producteur de manganèse, la joint-venture sino-gabonaise « La Compagnie Industrielle et Commerciale des Mines de Huazhou ». Elle avait obtenu la concession d’exploitation d’un autre gisement de manganèse situé dans les montagnes de Bembele à 36 km de la ville de Ndjolé. En 2008, l’entreprise étatique chinoise CITIC (China International Trust and Investment Corporation) avait racheté 51% des actions du consortium. Dans un exposé présenté en 2015 par ESSONO ONDO, coordonnateur des programmes à BrainForest, l’on apprenait que CICMH ne lancera officiellement l'exploitation du manganèse que si un accord tripartite Etat-COMILOG-CITIC est trouvé pour assurer le transport du minerai. D’après lui, CICMH est également en train de construire une usine à Ndjolé où 50 % de la production minérale sera transformée tandis que le reste de la production sera traité dans des usines en Chine. Le projet du gisement des montagnes de Bembele nécessite un investissement de 40 milliards de FCfa, une somme qui aurait déjà été prêtée à la joint-venture à un taux de 6,5%.

Il faut tout de même noter que les Chinois ont parfois essuyé des revers dans ce secteur minier. En décembre 2011, le Gabon avait résilié la convention minière dont bénéficiait la Compagnie minière de Belinga (Comibel), filiale à 75 % de la China Machinery Engineering Corporation (CMEC). Depuis janvier 2014, l'État gabonais, qui a définitivement repris les 75% de la Comibel, a le contrôle du projet. Ceci après que l’Etat ait remboursé à ses partenaires chinois« les frais relatifs aux travaux et études effectivement réalisés par ou pour le compte de la Comibel » dont le montant n’a pas été rendu public. Le projet, qu’Omar Bongo appelait « le projet du siècle », au vu du vaste gisement en place, prévoyait un investissement colossal de 1600 milliards de FCfa pour la construction de 560 km de chemin de fer entre Boué et le gisement, mais aussi pour la construction d’un port en eau profonde destiné à l’évacuation du minerai au cap Santa-Clara, entre autres infrastructures.

Quelques gouttes de pétrole

Ces quelques exemples montrent la détermination de la Chine à avoir des implantations et des parts de marché au Gabon. Les Chinois sont en effet actifs dans plusieurs domaines de l’économie gabonaise, même si ils font encore pâle figure dans le domaine du pétrole avec juste deux sociétés (Sinopec et Sino Gabon) devant les géants comme les Français avec trois sociétés (Total, Perenco, Maurel et Prom) ou devant les Américains avec sept sociétés (Amerada Hess, Anadarko, Forest Oil, Marathon, Transworld, Vaalco et Vanco).

Qu’à cela ne tienne, Pékin ambitionne de porter les échanges commerciaux Chine-Afrique à 400 milliards de dollars à l’horizon 2020. Au vu de ce qui précède, on peut déjà parier que le Gabon aura une part importante de ce pactole.

Beaugas-Orain Djoyum

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Le conseiller en politiques des TIC à la représentation gabonaise de la Banque mondiale évalue les défis et les avancées du Gabon en matière des TIC et Télécommunications.

Comment évaluez-vous au niveau de la Banque mondiale les politiques de développement des TIC au Gabon ?

Le Gabon est un exemple très intéressant d’une politique de développement de l’Internet et de l’économie numérique qui prend bien en compte tous les éléments nécessaires pour que cela soit un succès. Ce qu’on peut dire de l’approche gabonaise, c’est qu’elle est d’abord orientée sur la mise en place des infrastructures nécessaires pour que l’économie numérique se développe. C’est-à-dire avoir des réseaux à hauts débits, un bon accès à Internet et l’accès à la 4G. Quand on regarde aujourd’hui le Gabon, on a un marché concurrentiel avec du très haut débit à la disposition des citoyens. Il y a déjà 30% de pénétration des smartphones dans ce pays ce qui est considérable. Une fois que ces réseaux sont en places, on peut commencer à parler développement d’applications, de contenus et de services locaux puisqu’on a les moyens de les mettre à disposition des clients qu’ils soient particuliers ou des entreprises. Et ça, c’est la deuxième phase. Il faut savoir comment créer les conditions de développement de contenus, d’applications et de services locaux. C’est un grand défi et l’approche utilisée par le Gabon est encore intéressante puisqu’elle combine à la fois secteur public et secteur privé dans un partenariat gagnant-gagnant.

Comment évaluez-vous les actions du secteur public ?

Du côté du secteur public, ce qu’on voit, c’est le financement de grands chantiers dans le domaine de l’e-gouvernement susceptible de toucher beaucoup de gens. Notamment dans l’e-Santé. Ici au Gabon le fait d’investir dans le e-santé a généré des besoins de développement d’applications et de contenus locaux autour de la santé. L’autre pilier de ce partenariat c’est le secteur privé. Comment faire pour que des jeunes entrepreneurs de l’économie numérique gabonaise et généralement de la sous-région saisissent les opportunités du numérique. D’où la mise en place d’un écosystème d’innovation numérique dont le cœur est un incubateur numérique. Il n’y a pas aujourd’hui un incubateur numérique performant en Afrique centrale et ce sera une grande première au Gabon.

La Banque mondiale a mis globalement 56 millions de dollars dans ce poste projet e-Gabon. Pourquoi avoir choisir précisément d’accorder des financements pour soutenir le projet e-Santé et le projet de l’incubateur numérique ?

Au cœur des priorités et des objectifs de la Banque mondiale, il y a ce double objectif de prospérité partagée et de réduction de l’extrême pauvreté. L’on se rend compte que les principaux éléments qui peuvent permettre de travailler sur la réduction de l’extrême pauvreté sont des actions dans le domaine de l’agriculture, dans le domaine de la santé ou bien dans le domaine de l’éducation. On a accueilli de manière très favorable la proposition du gouvernement d’avoir un accompagnement de la Banque mondiale dans le domaine de l’e-santé. Donc, c’est la rencontre d’un souhait du gouvernement et aussi de nos objectifs d’améliorer très concrètement la vie des populations dans les pays où nous travaillons. Ça, c’est pour la partie e-Santé. Pour la partie de l’incubateur, l’un des grands défis de l’Afrique aujourd’hui c’est de trouver des emplois pour toute cette jeunesse. Cette jeunesse qui est formée et qui est la recherche des débouchés. L’économie numérique peut permettre justement d’offrir des débouchés à des jeunes entrepreneurs, à des jeunes innovateurs qui seront intéressés à saisir les opportunités offertes par l’économie numérique. Ils pourront peut-être devenir de grands innovateurs du Gabon dans les services de l’e-santé ou autres.

Comment va fonctionner cet incubateur ? Quels sont les types de jeunes qui seront encadrés ? Faudrait-il déjà avoir un business plan déjà élaboré ?

Notre approche consiste à travailler avec l’ensemble des acteurs pour mettre en place un écosystème d’innovation numérique. Donc, l’incubateur n’est qu’une des composantes. Si vous me le permettez, l’incubateur numérique a besoin de pouvoir accueillir des gens qui ont déjà un projet bien mûr et qui sont décidés à s’engager dans une démarche de création d’entreprise. L’un des enjeux de la mise en place de l’écosystème numérique, c’est de créer tout un pool, toute une population de jeunes entrepreneurs qui présentent déjà ces caractéristiques. Nous allons nous appuyer sur des structures qui sont déjà en place, des structures des types accélérateurs comme Ogooue Labs où les jeunes mûrissent leurs idées. Ils seront en ce moment-là dans une situation où ils pourront bénéficier pleinement des services de l’incubateur. Il faudrait également mettre en place un système avec des compétitions d’applications mobiles. Il faut aussi mettre en place des « Co-working Spaces », c'est-à-dire des espaces ouverts de travail disponibles 24h/24 avec des ordinateurs disposant d’une bonne capacité Internet, afin que des groupes de jeunes puissent commencer à coder et à développer leurs prototypes. Donc, le projet intègre vraiment l’ensemble de l’écosystème numérique pour générer une population de jeunes qui seront les clients de cet incubateur.

En Afrique centrale, la Banque mondiale soutien le projet du Central African Backbone. Comment évaluez-vous à ce jour la mise en place et l’évolution de ce projet ici au Gabon et dans la sous-région ?

L’un des objectifs clé de ce projet c’était d’améliorer la connectivité sous régionale, c'est-à-dire d’apporter l’Internet haut dédit, de qualité à des coûts abordables dans tous les pays de la sous-région. Au Gabon, je pense qu’on peut être très satisfait des résultats de ce projet, puisqu’il a permis de mettre en place une nouvelle station de câble sous-marin qui a permis d’améliorer considérablement la qualité de service. A Libreville, il y a une fibre optique sous-marine qui joint Libreville à Port-Gentil. On a pratiquement 60% de la population qui a déjà accès à une très bonne connexion Internet. Le projet Central African Backbone en cours de déploiement en ce moment vise à transporter cette connectivité dans les principales villes du pays : Franceville, Oyem et l’interconnexion avec le Congo. C’est là où la dimension sous régionale est intéressante, parce qu’on va permettre à présent à ces deux pays d’avoir une connexion terrestre qui permettrait de sécuriser le trafic entre les pays et aussi peut être de développer les applications qui fonctionneront au Gabon, au Congo et peut être demain au Cameroun, puisque le gouvernement gabonais nous a demandé de financer le prolongement du réseau vers la frontière du Cameroun. Donc, on va avoir une connexion entre les pays de la sous-région. Ce qui ressemblera à celle qu’on observe en Europe qui permet aux innovations de passer les frontières.

Vous assistez le Gabon comme un conseiller dans les politiques des TIC, de la part de la Banque mondiale. Ce matin, des opérateurs mobiles se plaignaient des sanctions élevées du régulateur télécom à la suite de la mauvaise qualité des services. Quel est votre avis sur la situation et comment le gouvernement devrait-il réagir face aux opérateurs mobiles ?

Ce qu’on observe dans le monde c’est que les secteurs des TIC qui sont libéralisés et compétitifs sont ceux qui se développent le plus vite et créent le plus de richesses. Ce sont aussi des secteurs susceptibles d’apporter le plus d’innovations aux populations. Donc, du point de vue de la cible, c’est vraiment cela qu’il faut viser. Après, ces acteurs ont des engagements. Puisqu’ils ont des fréquences nationales qui sont rares. Ces ressources rares sont attribuées à travers un processus concurrentiel et c’est normal, car un certain nombre des règles du jeu sont fixés dans les cahiers de charge et parmi ces règles du jeu, il y a les paramètres de qualité de service minimum. Donc, cela fait partie des responsabilités du régulateur de s’assurer que les règles du jeu soient respectées et lorsque ce n’est pas le cas, d’agir en conséquence. Il peut y avoir des variations de qualité de service mais les cahiers de charge ont mis en place des niveaux minimas et l’attente des consommateurs et des pouvoirs publics c’est que ces minimas soient respectés.

Propos recueillis par Beaugas-Orain Djoyum

 

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L’ICANN, l’Internet Corporation for Assigned Names and Numbers, l’organisme international chargé de la gestion de l’adressage sur Internet est disposé à accompagner le Gabon dans sa marche vers la société de l’information. Promesse en a été faire par le vice-président de l’Icann en charge de l’Afrique, Pierre Dandjinou, lors de la première édition du Salon international de l’Économie numérique et de l’Innovation du Gabon (SENIG 2015) qui s’est tenu du 14 au 18 décembre 2015 à Libreville au Gabon sous le thème : « Jeunesse et numérique, leviers de développement durable ».

Dans les propositions de sa leçon inaugurale sur le thème du salon, Pierre Dandjinou a évoqué l’aide de son institution au Gabon pour l’installation d’une copie des serveurs racines de l’Internet à Libreville. « Nous savons qu’il y a des pays où l’on peut refuser l’accès à l’Internet. Nous savons qu’il y a des pays qui peuvent mettre en place des protocoles pour diviser l’Internet. Nous devons travailler ensemble. (…) Nous sommes en train de discuter de la gouvernance de l’Internet. C’est très important. Il faut que l’on arrête de dire ’’L’Internet c’est 13 serveurs racines et pourquoi les Etats-Unis en ont 11 à eux seuls’’. La question n’est plus à ce niveau. On peut répliquer aujourd’hui les serveurs racines. Et c’est d’ailleurs l’appel que je fais au Premier ministre. Il faut que nous puissions avoir une copie du serveur racine de l’Internet au Gabon. Cela nous permettra à faire beaucoup de choses. Et je suis prêt à aider pour le travail dans ce sens. C’est donc un message d’espoir pour dire que beaucoup de choses sont possibles. Nous devons travailler et arrêter d’être simplement consommateurs de l’Internet », a déclaré Pierre Dandjinou en face des nombreux participants et du Premier ministre, Daniel Ona Ondo.

Le vice-Président de l’ICANN pour l’Afrique n’a pas manqué d’inciter les jeunes à plus d’innovation pour entrer véritablement dans le monde numérique. Pour lui, ce sont les jeunes qui font l’Internet. « Tous ceux qui ont fait de l’Internet ce qu’il est aujourd’hui l’ont fait quand ils avaient autour de 30 ans. Les innovations de l’internet n’ont jamais été le fait de ceux qui ont dépassé cet âge-là. C’est une réalité. Les jeunes ingénieurs américains qui ont découvert le protocole IP avaient entre 24 et 25 ans. Celui a fait arriver le web avait à peine 32 ans. Le promoteur de Facebook a lancé son innovation quand il avait autour de 20 ans. Donc, je crois qu’en Afrique, il y a des potentialités », a rappelé Pierre Dandjinou.

 

Un Centre d’alerte contre la cybercriminalité

L’innovation va également de pair avec la cybersécurité. Le Gabon qui ambitionne d’être un hub des TIC dans la sous-région Afrique centrale pense aussi qu’il faut mettre en place des mesures pour lutter contre la cybercriminalité. Lors des différents panels au SENIG, les experts nationaux et internationaux ont recommandé la création d’un Centre d’alerte pour la lutte contre la cybercriminalité. Un centre qui aura le mérite de prévenir et préparer la riposte aux attaques cybernétiques, selon le directeur général de la Promotion de l’Economie numérique et par ailleurs président du comité d’organisation du SENIG, Cyriaque D. KOUMA.

Autre solution, « en plus du Centre d’alerte pour la lutte contre la cybercriminalité, il y a la poursuite de la mise en place des organes de la gouvernance au Gabon pour développer un écosystème du numérique cohérant et dynamique, relève Cyriaque D. KOUMA. Je pense notamment au Conseil national du numérique, organe consultatif pour associer l’ensemble des acteurs à la prise des décisions ». D’après le ministre de l’Économie numérique et de la Poste, Pastor Ngoua N’neme, également intervenant lors des différents panels du Senig 2015, ce Conseil national du numérique, sera une sorte de think-tank réunissant tous les acteurs du secteur des TIC et télécommunications du Gabon. C’est ici que seront discutés les axes stratégiques à mettre en place, les actions les plus importantes à entreprendre et à développer pour faire du Gabon un pôle régional de services numériques à valeur ajoutée. « L’Etat ne sera pas seul dans la réalisation du Gabon numérique. La société civile et les entreprises sont également concernées. La meilleure chose à faire est donc de réunir l’ensemble de ces acteurs au sein d’un organe inclusif », argumente le ministre.

 

La formation en TIC

Au cours des débats, les panélistes du SENIG ont également convenu qu’il fallait faciliter l’accès des jeunes au numérique par la formation et la démocratisation de l’acquisition des ordinateurs et des tablettes. « Par ailleurs, l’on a noté l’adhésion au projet d’incubateur d’entreprise du numérique pour catalyser le développement des contenus numériques adaptés au contexte gabonais avec un impact réel sur la vie des citoyens. Autre proposition et non des moindres, la nécessité du financement du numérique par les initiatives privées », affirme le DG de la Promotion de l’Economie numérique.

La formation en TIC au Gabon reste un problème et le Conseiller spécial du président de la République en matière des TIC, Radwan Charafeddine, indique que le pays en a conscience : « Dans la révolution numérique que nous mettons en place au Gabon, la formation est l’un de nos principaux défis. Nous cherchons à devenir leader en matière de TIC. Nous ne pouvons pas le devenir si nous n’avons pas la matière grise et le capital humain, confie Radwan Charaffedine. Aujourd’hui, après avoir mis en place toutes ces infrastructures numériques, notre objectif est de créer des incubateurs. Cela va nous permettre de soutenir la jeunesse dans le domaine. Dans ce projet d’incubateur, nous avons prévu de faire des formations spécialisées dans le domaine de développement des applications. Mais, il y aura également des formations de niveau plus ou moins BTS qui vont former des jeunes Gabonais à ces métiers spécifiques pour faire en sorte que le Gabon puisse disposer de la matière grise dans le secteur. Mais, notre ambition c’est d’aller beaucoup plus loin. Nous faisons les choses par étape. Nous allons commencer par cet incubateur (annoncé au terme du premier trimestre 2016, ndlr) et si cela marche bien, nous allons aller plus loin avec la création des Masters spécialisés en TIC. »

Le Senig plateforme de partage des expériences

La première édition du Senig a enregistré d’après les organisateurs près de 1500 participants. Institutions publiques intervenant dans le domaine du numérique et opérateurs privés ont exposé leurs innovations à ce salon. Et le Premier ministre gabonais n’a pas manqué de les remercier. « Je tiens à remercier solennellement les opérateurs privés pour leur contribution. Je les encourage à densifier leurs opérations aux côtés de l’Etat pour l’atteinte des objectifs du plan sectoriel Gabon numérique. Pour cela, le gouvernement de la République les rassure de la dynamique d’amélioration du climat des affaires qui conditionne et garantit la pérennité de leurs interventions », a déclaré le Pr. Daniel Ona Ondo. D’après le Premier ministre gabonais, « la tenue du Senig répond à la volonté du président de la République, chef de l’Etat, Son Excellence, Ali Bongo Ondimba, de voir se tenir dans notre pays des événements dans le domaine du numérique pour marquer la détermination du Gabon à en faire un instrument essentiel de son développement. Le Senig se veut une plateforme ouverte à tous et propice au partage des expériences et un rendez-vous annuel d’échanges entre l’ensemble des acteurs du secteur leur permettant d’évoquer les questions liées au numérique ».

L’objectif déclaré du SENIG, a insisté pour sa part le ministre de l’Économie numérique et de la Poste, Pastor Ngoua N’neme, est de parvenir à la révolution numérique du Gabon. « L'ambition du Président Ali BONGO ONDIMBA est de développer les TIC dans notre pays pour en faire un levier important de croissance et de transformation sociale, c'est le sens des importants investissements d'infrastructures entrepris dans le cadre du Plan Gabon Numérique pour connecter la population gabonaise et préparer notre pays le Gabon à la révolution numérique. Le Salon de l’Economie Numérique et de l’Innovation du Gabon (SENIG) qui se situe dans le droit fil de cette ambition vise à promouvoir et à vulgariser les TIC au sein de la population, de la jeunesse en particulier et parmi les décideurs. Suivant le vœu du Président Ali Bongo Ondimba, nous allons travailler très dur pour faire du SENIG l'événement annuel sous régional de référence en matière de TIC », a déclaré le ministre.

C’est en décembre 2016 que se tiendra la prochaine édition du SENIG. D’après les organisateurs, plusieurs innovations et de nombreux experts et opérateurs internationaux et régionaux seront au programme. « Le SENIG est un salon international dont l’ambition cette année était de le mettre sur la rampe avec l’espoir qu’il deviendra une plateforme de référence sur le plan international », affirme Cyriaque D. Kouma, le président du Comité d’organisation du SENIG.

Beaugas-Orain Djoyum

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Imaginez que vous recevez un appel entrant international. Au lieu que le numéro de téléphone qui s’affiche soit un numéro international, c’est plutôt un numéro local que vous voyez sur votre téléphone. Et plus encore, il est impossible de rappeler votre correspondant étranger parce que ce numéro local ne passe pas par la suite. Si par hasard le numéro passe, c’est un Gabonais qui décroche. Vous n’avez donc plus la possibilité d’enregistrer le numéro réel de votre interlocuteur étranger. C’est la fraude sur les appels internationaux entrants, communément appelé fraude à la SIM Box ou encore trafic gris by-pass. Après la RDC, le Congo, le Cameroun en Afrique centrale, le Gabon fait désormais face à cette fraude qui fait perdre tant d’argent au trésor public et aux opérateurs.

En collaboration avec les forces de l’ordre, l’Autorité de régulation des communications électroniques et de la Poste (Arcep) du Gabon a interpellé six personnes impliquées dans la fraude à la SIM Box à Libreville. Ces personnes étaient pilotées par un expert qui a également été mis aux arrêts. C’est ce qu’a laissé entendre le secrétaire exécutif de l’Arcep, jeudi dernier, 10 décembre 2015, au cours d’une émission sur Gabon Télévision, la chaîne de télévision nationale.

D’après Serge Essongue Ewanpango, des jeunes Gabonais figurent dans ces interpellations. « Hier encore (09 décembre 2015, ndlr), nous avons interpelé une personne qui avait un équipement qui permettait d’envoyer 360 communications par des voies que nous appelons des voies détournées. Ce monsieur vient polluer le réseau d’un opérateur. Cet opérateur n’a pas prévu cela. Je prends un seul cas, mais imaginez que l’on multiplie cela par dix ou par 20. C’est un problème. (…) Il y a eu quelques jeunes Gabonais dans les six ou sept interpellations que nous avons déjà faites », a-t-il déclaré.

Le phénomène est assez nouveau dans le pays comme nous a confié Lin Monbo, le Président du conseil de régulation de l’Arcep. « C’est un phénomène assez nouveau au Gabon. Il y a à peine trois mois que nous avons observé le trafic gris. De ce qu’on entendait au Cameroun voisin ou au Congo, on se doutait bien que ce phénomène allait entrer au Gabon », affirme-t-il.

Comprendre la fraude

Généralement pour effectuer cette fraude à la SIM Box, le pirate installe une plate-forme comprenant une antenne parabolique VSAT à travers laquelle il reçoit les communications internationales, souvent par Internet. A l’aide de ses ordinateurs et d’un dispositif adéquat, il enlève l’identification de la provenance de l’appelant et le remplace par un numéro local installé dans la Sim box. Cette SIM Box est un boitier qui comporte plusieurs cartes SIM de différents réseaux. C’est ainsi que l’appel international est transformé en appel local.

Généralement, le destinataire qui reçoit l’appel ne peut par contre pas rappeler l’appelant. Le pirate est payé par les carriers ou transporteurs internationaux (avec qui les opérateurs signent des contrats pour l’interconnexion) au tarif d’un appel international. Au lieu de payer les frais de terminaisons des appels entrants internationaux aux opérateurs, les carriers internationaux qui transportent ces appels payent plutôt à ces pirates qui se font plein les poches et qui prennent aux carriers internationaux moins d’argent que les opérateurs mobiles. Privant ainsi le Trésor public et les opérateurs mobiles des frais liés à aux terminaisons de ces appels internationaux. Au finish donc, les frais de terminaison ne sont pas payés par ce pirate, ni à l’Etat congolais, ni à l’opérateur mobile ayant terminé l’appel dans son réseau, celui-ci ne percevant que le coût d’un appel local.

Ce phénomène peut aussi participer à l’explication du nombre réduit des appels internationaux entrants au Gabon par rapport aux appels internationaux sortants. Car, d’après les derniers chiffres du régulateur gabonais, les Gabonais appellent plus à l’international qu’ils ne reçoivent des appels internationaux entrants. En effet, le nombre de minutes d’appels internationaux entrants au Gabon au terme du premier semestre 2015 était de 18,59 millions de minutes. Tandis que le trafic voix sortant vers l’international était de 71,38 millions de minutes pour la même période.

Et si les opérateurs étaient complices…

Il faut également reconnaître que les opérateurs mobiles eux-mêmes peuvent participer à la fraude sur les appels internationaux entrants. Dans d’autres cas, pour payer moins de taxes, les opérateurs mobiles peuvent faire de fausses déclarations. La fraude consistera alors à faire de fausses déclarations de volume des minutes internationales enregistrées. Dans ces cas, les chiffres diffusés par les opérateurs de téléphonie mobile au régulateur ne correspondent plus à la réalité du trafic reçu de l’étranger.

Aussi, les experts reconnaissent qu’un opérateur donné peut recevoir les communications internationales, modifier certaines caractéristiques de ces appels internationaux et les transfère vers un autre opérateur qui termine ces appels sur son réseau. D’autres experts en télécoms peuvent encore mettre en place un dispositif pour effectuer la fraude à la SIM Box. C’est ce qui avait par exemple été observé au Maroc avec l’ex-DG de l’opérateur INWI.

La Chambre correctionnelle près le Tribunal de première instance d’Aïn Sbaa, à Casablanca avait condamné Karim Kaz à cinq ans de prison ferme et au paiement d’une amende de 20 000 dirhams marocains (1986 dollars), à la saisie de tous ses biens, à la dissolution de sa société, ainsi qu’à une autre amende de 40 000 dirhams (3972 dollars) au profit de l’Office des changes et aux dommages et intérêts. Il était poursuivi pour constitution de bande criminelle, de détournement du trafic téléphonique international, de faux et usage de faux, de blanchiment d’argent.

Les déboires de Karim Kaz, qui avait quitté son poste de DG d’Inwi en 2009, avaient commencé en 2013 suite au brouillage des appels d’INWI dans un quartier de Casablanca. INWI avait alors porté plainte et, suite à une enquête, la police avait découvert un réseau pirate détournant les appels internationaux. Le réseau comptait deux collaborateurs de Karim Zaz, qui, sous le couvert du lancement d’un centre d’appel, avaient acquis des équipements télécoms sophistiqués. Lors d’une perquisition dans les locaux de la société dénommée SIART, liée aux activités de Karim Zaz, du matériel informatique et des cartes SIM y avaient été retrouvés.

Les régulateurs et les Etats devraient donc être vigilants sur les activités des opérateurs télécoms déclarés et prendre des mesures techniques pour s’assurer de l’authenticité des chiffres sur les appels internationaux entrants déclarés.

Les conséquences de la fraude à la SIM Box au Gabon

Comme conséquence de la fraude à la SIM Box, en plus des pertes enregistrées par l’Etat et les opérateurs, il y a des conséquences sur les abonnés. Les explications de Serge Essongue Ewanpango : « Il y a risque énorme à la sécurité de l’Etat. Car, imaginez qu’une haute autorité attend un appel de l’étranger. Vous recevez plutôt un appel local dont vous ignorez le numéro. C’est peut-être un appel qui va vous permettre de conclure un business important, mais vous ne connaissez pas ce numéro important. Vous ne décrochez pas et vous perdez peut-être ce marché. (…) Sans compter que cette personne peut écouter l’appel, alors que la législation au Gabon protège le secret et la confidentialité des conversations téléphoniques ».

Les opérateurs mobiles y voient également d’autres conséquences hormis les pertes d’argent enregistrées. « C’est un fléau qu’il faut combattre. C’est un fléau qui touche à la fois les revenus des opérateurs, de l’Etat, la qualité des appels et la sécurité du pays », a indiqué Abderrahim Koumaa, le DG de Gabon Télécom au cours de l’émission télé de jeudi dernier sur Gabon Télévision.

En ce qui concerne le montant des pertes enregistrées par le Gabon à cause de la fraude à la SIM Box, l’Arcep n’avance pas encore de chiffres. « Aujourd’hui, je ne peux pas vous donner un chiffre, car nous sommes encore en train de travailler là-dessus », affirme Lin Mombo.

La stratégie du Gabon

Chaque pays a sa stratégie pour combattre le phénomène. Au Gabon, dès le constat du phénomène, l’Autorité de régulation des télécommunications s’est dotée d’un dispositif adéquat pour contrôler les appels internationaux entrants afin de prévenir la fraude à la SIM Box. C’est ce qu’indique Lin Mombo. « En plus, explique le président du Conseil de régulation de l’Arcep, nous avons mis en place une commission de lutte contre le trafic gris. Elle est composée des ingénieurs de l’Autorité de régulation et des représentants de chaque compagnie de téléphonie mobile. A travers nos outils, quand nous constatons que le trafic gris se développe dans une zone, rapidement, le protocole est mis en place. »

C’est donc ce dispositif qui a permis aux récentes interpellations. Si Serge Essongue Ewanpango n’a pas donné des détails sur le principal interpellé jeudi dernier, il a indiqué que celui-ci fera la prison et paiera de fortes amendes, car il a fait perdre de l’argent à l’Etat gabonais. « C’est un individu qui est au Gabon, qui décide de négocier avec des partenaires étrangers pour faire entrer les appels internationaux sans autorisation légale. Il détourne les deniers publics, parce que ce trafic international est régi par un certain nombre de dispositions réglementaires. Il y a une partie de ces fonds qui revient aux opérateurs. En gros, c’est 137 francs (la minute de l’appel international entrant, ndlr). Il y a 90 francs pour les opérateurs, 37 francs pour le fonds du développement de l’Economie numérique, et (le reste, ndlr) pour un certain nombre d’actions comme les équipements et autres qui permettent de surveiller cela », a expliqué le secrétaire exécutif de l’Arcep.

Les mesures pour prévenir

L’Arcep envisage également de limiter la détention des cartes SIM pour limiter la fraude. « Nous avons également fait une étude sur l’acquisition des cartes Sim, parce qu’il n’est pas normal qu’un individu achète par exemple 100 cartes SIM. Car ce sont les cartes SIM qui sont à la base de cette fraude et qui ravitaillent ces SIM BOX », affirme Lin Mombo, le président du Conseil de régulation de l’Arcep.

Le régulateur a également choisi de sensibiliser les Gabonais qui, par ignorance, pourraient se lancer dans cette fraude à la SIM Box. « Je voudrais lancer un appel aux jeunes Gabonais d’être prudents, interpelle le secrétaire exécutif de l’Arcep. Il y a des Gabonais qui ont été contactés par des gens à l’étranger ou des gens qui sont dans les pays africains ou les pays du Golfe persique. Ces gens leur envoient un équipement appelé SIMBOX qui peut prendre six, 24, 380 puces. Et là, ils ont un simple téléphone mobile qu’ils utilisent. Les appels viennent via Internet et ils envoient ces appels en réseau local. En termes clairs, il détourne le revenu de l’opérateur. (…) Quand, ils sont interpellés, ils vont en prison. Certains disent qu’ils ne savaient pas. Or, nul n’est censé ignorer la loi ».

D’après Serge Essongue Ewanpango, toute activité commerciale au Gabon est régie par un certain nombre de textes. Il faut se renseigner sur ces textes avant de se lancer dans une activité, recommande-t-il. Pour le secteur des télécoms au Gabon, l’autorisation de l’Arcep doit être un préalable, rappelle-t-il. Difficile à croire que ces fraudeurs vont l’entendre, tant les gains sont faciles pour ces fraudeurs-là. Avec leurs risques et périls.

Beaugas-Orain Djoyum

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Eric Chinje, le CEO de l’African Media Initiative et ancien porte-parole de la Banque mondiale sur les affaires africaines, explique pourquoi l’Afrique n’a pas de médias forts et puissants. Pour lui, les hommes d’affaires n’investissent pas dans les médias africains, parce que ceux-ci n’inspirent pas confiance.

A la suite des derniers attentats en France, des voix se sont élevées en Afrique pour s’insurger contre le fait que des attentats plus meurtriers sont commis sur le continent africains, mais ne sont pas médiatisés. N’y a-t-il pas lieu d’inciter les hommes d’affaires africains à investir dans des médias africains afin qu’on ait des médias africains suffisamment puissants pour diffuser l’information africaine en direction du monde ?

Nous travaillons dans ce sens avec les différentes autorités, notamment celles de l’Union africaine, la présidente de l’Ile Maurice, l’ancien président de la Tanzanie ou encore le président du Malawi. Il faut un engagement des dirigeants du continent, car ils doivent comprendre que le développement passe forcément par les médias, la diffusion des idées, la possibilité de critiquer les politiques en donnant d’autres perspectives qui aident tout le monde. Il faut les aider à comprendre que les médias ont aussi la responsabilité de soutenir les efforts de développement. Il faut les amener à voir les médias comme des partenaires au développement. Regarder comment dans les pays développés, les médias traitent la question des migrations. Ils rendent compte de la réflexion menée sur cette question au moment où les gouvernements cherchent à développer des politiques adaptées. Ce sont les médias qui donnent des points de vue différents sur le sujet. Quand il s’agit des questions d’emploi par exemple c’est toute la presse qui donne un point de vue. C’est ça qui informe les politiques adoptées par le gouvernement. En Afrique et au Cameroun en particulier, nous avons toutes sortes de crises : santé, éducation, énergie, etc. Mais où sont les médias ? Ils doivent dépasser les questions politiciennes pour poser les véritables problèmes de la vie quotidienne des gens. Au Cameroun, il y a une crise de l’éducation. Si tous les médias se saisissaient de ce sujet, en donnant des points de vue différents, mais qui contribuent à renforcer la compréhension publique de la situation, je suis convaincu que les hommes politiques réagiraient, c’est-à-dire le parlement, le gouvernement, le président de la République, etc. Mais les médias passent le temps à critiquer ce qui est fait, au lieu de contribuer à développer les politiques adaptées à la situation. Du coup, les hommes d’affaires n’investissent pas dans les médias africains, parce que ceux-ci n’inspirent pas confiance. En tout cas, moi je ne peux pas investir dans les médias, car je ne vois pas ce que je gagnerai. Les journaux qui ont atteint un certain niveau de confiance avec le public arrivent quand même à s’en sortir. Il faut cette confiance avec le public pour attirer les investisseurs. Il faut aussi former les journalistes, bien les payer, intégrer la technologie ; bref c’est tout un ensemble. J’ai une vue panoramique des médias africains, de l’Algérie à l’Afrique du Sud, de l’Egypte au Kenya. Je suis l’évolution dans les pays et j’ai fait un constat : dans les pays anglophones, les médias ont tendance à foncer avant de demander les soutiens ; mais dans les pays francophones c’est l’inverse, les médias demandent d’abord l’argent. C’est une petite différence, mais elle est fondamentale.

Dans une interview récente avec le journal sénégalais Le Soleil, vous avez déclaré qu’il existe aujourd’hui des fonds pouvant servir à un premier financement des médias africains. Alors, quels sont ces fonds destinés à la presse africaine ?

Je disais que l’organisation que je dirige, l’Initiative pour les médias africains (African Media Initiative), est en train de travailler avec des institutions pour mettre en place un fonds destiné au financement des médias africains. Mais, il existe des petites structures qui offrent des financements, par exemple le fonds spécial pour le développement des médias en Afrique Australe. Un fonds similaire existe en Afrique de l’Ouest offert par l’Open Society Institute for West Africa. Il y a aussi l’Open society Institute for Southern Africa. Ces petits fonds sont destinés à une sous-région précise. Nous voulons travailler avec les organismes dans un premier temps pour élargir ces fonds. Je suis également en discussion avec des gouvernements et la Banque africaine de développement. J’espère que d’ici quelques mois, on va lancer le fonds des médias. L’idée est d’accompagner la presse, car pour le moment, les entreprises de presse n’ont pas accès aux grands capitaux, ne sont pas considérées par les institutions financières comme étant fiables. Personne ne veut investir dans ces entreprises, du moins pas des sommes importantes.

Vous avez cité plusieurs fonds régionaux, mais aucun pour l’Afrique Centrale. Y a-t-il un problème particulier avec cette sous-région ?

Je ne connais pas de fonds destiné à l’Afrique Centrale. Cette partie du continent présente malheureusement un visage assez particulier. Le monde voit l’Afrique centrale comme une région compliquée. C’est ici qu’on parle le plus des problèmes de gouvernance, de prolongation des mandats présidentiels. Les gens ne veulent pas trop s’impliquer en Afrique centrale. C’est la réalité, et il faut le dire. On ne parle pas de 3ème mandat présidentiel en Afrique australe. Ça n’existe presque plus en Afrique de l’Est. Il y a une évolution en Afrique de l’Ouest. L’Afrique centrale est particulière...

Vous demandez aux patrons de presse d’avoir les moyens pour rémunérer leurs journalistes avant de se lancer dans une aventure éditoriale. Que faire de ceux qui ont déjà lancé des médias, mais qui n’ont pas les moyens de le faire ?

C’est précisément pour ceux-là que nous travaillons à mettre en place le fonds. J’espère que dans quelques mois, nous serons en mesure d’annoncer sa création.

Est-ce qu’il faut juste des capitaux pour rendre les entreprises de presse viables ?

Pas du tout. Ce n’est pas parce que ces fonds vont exister que n’importe qui pourra y avoir accès. Il y a des conditions. Par exemple, avoir des journalistes professionnels, une comptabilité saine et vérifiable, avoir du matériel. Les gens diront « nous ne pouvons pas avoir des machines si nous n’avons pas d’argent ».

L’une des solutions n’est-elle pas le respect des accords de Florence qui exonèrent de taxes plusieurs intrants de la presse écrite ?

Il revient à chaque gouvernement de prendre la décision. J’ai eu des discussions avec l’Union africaine. Avec Mme Zuma, la présidente de la commission, nous avons parlé de la nécessité de changer le niveau et la qualité du dialogue entre les médias et les gouvernants africains. Ça s’impose car, si les médias doivent changer, il faut repenser leurs relations avec le secteur public et avec le secteur privé.

Les gouvernements africains ont-ils intérêt qu’il y ait des médias forts et indépendants sur le continent ?

Il n’y aura jamais de modernisation de l’Afrique sans des médias forts. C’est inévitable. Il faut un certain niveau de collaboration entre les gouvernements qui énoncent des politiques et les médias qui critiquent ces politiques et informent sur ces politiques. Les médias doivent jouer un rôle d’éducation et d’information citoyenne.

Cette collaboration est-elle possible avec des dirigeants qui font tout pour s’éterniser au pouvoir ?

Les professionnels des médias doivent comprendre qu’ils n’existent pas par rapport aux gouvernements et qu’ils ne doivent pas se braquer contre ceux-ci. Ça n’a rien à voir. Les médias sont là pour informer les citoyens et rendre compte des situations de manière équilibrée. Les articles doivent présenter tous les aspects d’un problème. En Afrique centrale, quand j’entends les journalistes parler c’est comme s’ils sont en guerre permanente avec le gouvernement. C’est une conception fausse du rôle des médias. C’est un véritable problème. On doit changer la mentalité, la façon de voir, le niveau de réflexion. Les médias ne sont pas là pour décider qui doit diriger le pays ou pas. Ils ont pour rôle d’informer le citoyen afin que celui-ci puisse prendre ses responsabilités en décidant qui doit gouverner.

Propos recueillis par Beaugas-Orain Djoyum et Assongmo Necdem

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